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Méduses

Antoine Brea

octobre 2005

1

Tu étais en retard. Tu avais fini par appeler et tu étais en retard. Tu m’avais demandé pardon. J’avais dit que non que ce n’était rien. Je t’avais attendue sous la pluie mais ce n’était rien. J’étais bien sous la pluie à t’attendre. Je surveillais la bouche du métro par laquelle tu devais arriver et puis quand quelqu’un surgissait, je faisais semblant de réfléchir à un truc important, de prendre le frais, de m’intéresser à la circulation, de ne pas t’espérer démesurément. Je ne voulais pas que tu pensasses que je t’attendais, même si en définitive je n’avais pas d’autre raison d’être là vu que c’était prévu. Ton coup de fil m’avait impressionné, surpris, même si au total je l’attendais ; tu n’étais plus avec l’autre, la rupture était consommée, cette fois-ci elle durait. Je t’avais attendue une vingtaine de minutes je pense, mais ça allait, j’étais bien, terrassé par ton absence. Je m’étais levé tôt ce matin pour être à l’heure à notre rendez-vous de cette après-midi ; je m’étais levé comme Lazare ébloui par la lumière après une nuit agitée après un terrible accident avec un épouvantable mal au crâne. La pluie lavait et me faisait du bien. Il était prévu que l’on se retrouvât ici et, par conséquent, il était logique que je t’y attendisse au cas où je fusse arrivé en avance. J’étais arrivé en avance comme d’habitude ; et comme d’habitude tu étais toi en retard. On avait marché un peu pendant que tu t’excusais. Assez longtemps. Je palabrais des choses, tu ne m’écoutais pas. On s’en était rendu compte tous les deux ; je m’étais tu et ça t’avait fait rire. Tu m’avais demandé si celui-là me plaisait. Je n’étais pas sûr de savoir de quoi tu parlais. J’avais dit oui si tu veux, sans certitude. On s’était assis en terrasse d’un café et ça tombait bien parce que je ne tenais plus en l’air. J’avais demandé par inadvertance si on ne serait pas mieux à l’intérieur. Tu avais cru comprendre que je préférais dehors. Tu avais froid et je m’en étais aperçu. On s’était mis en terrasse. On aurait pu s’asseoir à l’intérieur pour te faire plaisir si tu avais insisté. J’avais froid. Tu avais éteint le soleil et j’avais froid. C’était un peu bête comme situation. Il y avait cette espèce de lampe à gaz en hauteur pour chauffer les tables. C’était très à la mode alors ce genre de chauffages d’extérieur en hiver dans les cafés. On buvait de la bière sous un parasol de feu. Je fumais des cigarettes dans une canicule d’hiver. Tu n’aimais pas trop que je fumasse. C’était un café à la mode où l’on croisait en principe beaucoup de pédérastes. Le quartier le voulait. C’était un quartier à la mode. Je soufflais de la fumée dans ma bière par les narines en buvant. Quand je reposais mon verre, le verre continuait de fumer ; tu disais que j’aurais dû faire souffleur de verre. Tu trouvais drôle et beau, mais tu n’aimais pas trop que je fumasse. J’avalais un mélange fluvial de céréales en fermentation, blond et fumant. On s’était demandé si le serveur était pédéraste. Il était très aimable, il blaguait avec moi. Je pensais qu’il faisait ça pour te faire rire. Tu t’étais souvenue que j’avais en général beaucoup de succès avec les pédérastes. Tu ne disais pas ça pour me faire de la peine et je n’en avais pas ; il faut dire aussi que j’avais du mal à me concentrer, pénétré que j’étais de mes nouvelles activités de verrier souffleur. C’était vrai : j’avais toujours eu beaucoup de succès avec les pédérastes. On avait bien ri tous les deux de mes succès avec les pédérastes. Je t’avais donné un cadeau. C’était Noël et je ne me sentais pas vraiment gêné, c’était de saison après tout. On n’avait plus reparlé de cette histoire de cadeau après. Tu avais dit merci. C’était mieux comme ça. J’avais pensé que le cadeau te plairait. Tu avais hésité un moment et puis tu avais déposé un baiser distant sur les côtés de mon visage en disant merci. Tu m’avais effleuré en faisant bien attention de ne pas te blesser. Mon visage était couvert de ronces et coupant. Tu disais comme ça que c’était ton premier cadeau de Noël et, corrélativement, tu me remerciais. J’étais bien content que ce fût le premier qu’on t’eût offert cette année et puis on n’en avait plus reparlé. Je pensais que j’aurais dû me raser, me tondre la laine de verre. Tu étais gaie et tu t’étais élancée pour discuter. Tu laissais échapper beaucoup de mots, tu usinais des phrases, tu articulais mais je ne t’écoutais pas. Je me disais que j’étais bien content que ce fût ton premier cadeau et qu’il t’eût plu, que tu le trouvasses beau. En somme je trouvais aussi que c’était plutôt un beau cadeau, que tu avais de la chance. Le genre de cadeaux que je me fusse probablement acheté si j’avais eu de l’affection pour moi, si j’avais eu le courage de me faire la barbe, si j’avais cru à tout ça. Tu parlais trop et me demandais comment j’allais en ce moment. J’allais bien merci. J’avais froid malgré le chauffage au gaz et puis ça n’était pas la grande forme en ce moment où la mort était un sujet somnolent au fond de moi, qui m’empêchait de dormir, me reposer, me raser. Ça faisait longtemps qu’on ne s’était plus vu, plus donné de nouvelles, et tu voulais savoir comment j’allais. Je ne t’avais pas demandé si ça allait, si tu étais en forme, pourquoi je n’avais plus de nouvelles de toi depuis tant de temps, si c’était parce que tu ne supportais plus les types repoussants, négligés, froissés. On s’était tu et puis on n’en avait plus parlé finalement. Tu caressais le pied de ton verre de bière silencieusement et je jugeais tes gestes obscènes. Ça m’ennuyait que tu fisses ça ; j’eusse aimé te flanquer une bonne gifle pour que tu cessasses. Tu étais animée ; tu parlais beaucoup comme d’habitude et moi moins. Je ne disais rien, buvais ma bière en fumant, caressais les côtés drus de ma figure. Dans la rue tu m’avais plaisanté et appelé ton pauvre chéri parce que je m’étais plaint de l’inefficacité notable du médecin que j’avais consulté sans qu’il me trouvât rien. Je n’avais pas de cancer d’après lui, qui n’avait diagnostiqué qu’un peu de fatigue. Il avait mesuré ma tension et refusé de me prescrire des calmants ; je n’avais pas insisté pour la morphine. Tu racontais des choses, posais des questions auxquelles je m’efforçais de ne pas répondre, que je n’ai pas retenues. Tes questions n’avaient aucune importance et je me demandais ce qui se dissimulait derrière ce « pauvre chéri », ce que je pourrais bien en faire ultérieurement, ce qu’il en fallait extraire. Le cadeau t’avait plu et ça c’était un signe, ça comptait ; n’importe quel type mal rasé la figure en végétation l’eût compris. Tu l’avais trouvé beau et moi j’étais content. Je te l’avais dit. Peut-être je n’aurais pas dû ; peut-être j’aurais dû t’offrir autre chose et souffrir. Je réfléchissais à ce que tu entendais exactement par « pauvre chéri ». Ton pauvre chéri avait commandé une deuxième bière, pour toi et pour lui. Il était parti aux toilettes. Dans les toilettes il s’était regardé dans la glace et s’était trouvé grotesque et tragiquement nu sous sa barbe taillis. Il ne s’était pas lavé les mains et des hommes attablés l’avaient regardé avec sexe quand il était sorti. Il s’était demandé si ses mains sentaient. De retour à la table en terrasse, je m’étais inquiété de trouver ta chaise béante de vide. Je m’étais frotté les yeux, le visage, et ensuite tu étais debout légèrement plus loin à discuter avec des connaissances à toi qui devaient passer là par hasard. Je m’angoissais de mes mains scabreuses quand vous vous étiez retournés pour me faire sortir de nulle part. J’avais tout de suite senti que tes amis étaient pédérastes. Vraisemblablement en couple. J’avais serré les doigts qu’on me tendait et je m’étais trouvé mal. Tu m’avais présenté. J’avais pris sur moi de me rasseoir pour ne pas défaillir tandis que vous restiez debout, droits comme des vrais hommes. Je me disais que probablement je n’aurais pas dû m’asseoir, que ça ne se faisait pas, ou alors leur proposer de faire de même, être un peu gentil, gay friendly, mais je n’avais pas tellement envie qu’ils s’installassent entre nous. Je pensais qu’il eût été recommandé de se relever maintenant, mais sans doute c’était trop tard et puis ça se fût vu, eût été mal perçu par tes amis pédérastes qui se fussent interrogés. J’avais décidé de rester assis, d’attendre que les choses se passassent. Je m’en voulais de ne m’être pas lavé les mains : quel idiot j’avais été. Les deux pédérastes étaient peu rasés ; l’un des deux portait le bouc — dégueulasse. Je repensais à ce que tu m’avais dit, je faisais un peu le point. Tes amis pédérastes partis, tu t’étais rassise, mais pour te relever incontinente et t’éloigner en direction des toilettes me laissant seul devant le monde dans une nuit de toi. Tu t’étais excusée. Tu étais toujours si polie. Je me demandais si tu allais penser à te laver les mains. J’aurais préféré t’accompagner au cas où les types attablés t’auraient fait des remarques désobligeantes sur l’hygiène de tes mains au sortir des cabinets ; j’aurais aimé assister à tes ablutions au cas où tu y aurais procédé. Je me disais que tu n’aurais que modérément apprécié que je voulusse t’escorter dans les lieux d’aisances. J’étais content d’être tranquille un peu tout seul. Jadis, tu admirais ma discrétion légendaire. Je réfléchissais, savoir si je te manquais déjà. J’avais froid, peur d’attraper la mort je crois. Tu étais restée un petit moment aux toilettes, mais je n’avais pas pu calculer exactement, dérangé par un coup de téléphone. Malaisé de dire si tu avais eu le temps de te laver les mains ou non. On avait reparlé de tes amis pédérastes pendant quelques instants, difficiles à apprécier, et puis on était passé à autre chose. J’avais bien saisi que tu n’avais pas tellement envie de t’étendre sur la question de tes amis pédérastes et puis ça ne m’intéressait pas tant que ça non plus et puis tu avais reçu deux coups de téléphone, coup sur coup. Tu t’étais remise à poser énormément de questions dont je ne garde aucun souvenir. Tu demandais si je voulais des enfants, combien et quand. Je t’avais répondu que ce n’était pas le problème et j’aurais bien voulu savoir qui t’avait téléphoné. Tu disais que j’avais raison, que c’était quelque chose d’important, qui ne se traitait pas par-dessus la jambe, que toi à présent tu en désirais ; tu demandais quel âge j’avais quand mes parents s’étaient pratiquement entretués, si j’étais sage quand j’étais petit. Je ne savais plus très bien et puis c’était sûrement l’autre au téléphone ; je me disais que c’était certain, que tu t’étais remise avec lui. J’étais déjà vieux il me semble ; un peu sage. Les enfants sages font du reste les meilleurs assassins ; ils ne se cachent pas sous les tables, respectent leurs père et mère mais plus tard le font payer très cher à la société. J’avais presque fini ma deuxième bière, j’observais voir où toi tu en étais. J’étais bien quoique horriblement mal et je m’apprêtais déjà à recommander de peur que tu ne profitasses de ton verre vide pour t’en aller. J’eusse aimé être seul à ce moment-là. Le cadeau t’avait plu, j’avais beaucoup de succès avec le serveur et j’avais vaguement envie de me tuer devant tes yeux pour voir la gueule que tu ferais. Je me demandais si tu serais triste, pourquoi tu ne m’avais plus donné de nouvelles durant si longtemps. Je t’avais dit qu’il fallait que je partisse à présent, des choses à faire. J’avais tellement peur de me retrouver tout seul et devoir me raser la figure, me laver mes mains sales. Je t’avais demandé ce que tu allais faire maintenant, si tu avais quelque chose de prévu. Tu ne m’avais pas répondu ou si mal et j’en avais déduit que ce n’était peut-être pas l’autre que tu irais retrouver une fois que je me serais jeté sous un train. Tu avais payé et on marchait. J’avais insisté pour régler et je me demandais où tu voulais en venir avec tes histoires de procréation, de conservation, d’agrandissement. Tu t’étais aussi inquiétée de savoir avec qui j’avais passé mon samedi dernier et j’avais imaginé un imperceptible voilement dans ton regard quand j’avais répondu avec une amie — chose dont je ne me souviens pas qu’elle fût vraie ou trafiquée. Je me disais que cinq enfants ce serait bien, mais je ne savais pas s’il fallait que tu fusses leur mère. J’essayais de te rêver enceinte ; c’était difficile parce que tu n’arrêtais pas de jacasser. Enceinte tu étais affreuse et j’eusse préféré moi te conserver en l’état ; c’est comme ça que je te trouvais belle. Je me demandais si tu disais ça pour savoir si je voulais avoir des enfants peut-être avec toi. Je trouvais un peu prématurée ta requête. Je réfléchissais, savoir si je t’envisageais réellement belle. La question se posait d’actualité et je n’étais pas tout à fait sûr. Je me demandais si tu me trouvais encore beau de temps en temps, ce que tu pouvais déceler en moi qui te donnât envie que je fusse le père reconnu de tes enfants. Tu ne t’étais même pas renseignée pour savoir si ma situation autorisait de tels projets, si j’étais assez mûr pour être père, où en était mon statut sérologique, quels étaient les résultats de mes analyses, si je cultivais un amour fol et idolâtre pour toi, et en cela je te trouvais belle. Tu ne voulais pas d’enfant de moi, aucun doute là-dessus, tu t’étais remise avec l’autre, tu étais parfaite. Tu m’avais interrogé au sujet de ton nouveau manteau acheté dernièrement dans une braderie : est-ce que je le trouvais beau ? Je trouvais étrange et difficile cette énigme à propos de ton vieux manteau tout neuf ; n’était-ce pas là un moyen féminin et étudié de m’enseigner que tu m’aimais ? J’avais du mal à me faire une idée précise, occupé que j’étais à mûrir l’assassinat de l’autre que tu avais repris. J’avais répondu oui très beau après m’être vaguement moqué de ses allures de peignoir en solde. Tu m’avais traité de connard en riant et tu paraissais contente de nous. Ta main à ce moment-là avait frôlé la mienne et je pensais que j’opterais probablement pour un coup de couteau dans la panse sous le porche de son immeuble. On marchait vite, tu voulais me raccompagner à la gare et c’était loin, tu laissais sourdre beaucoup de bruit d’entre tes lèvres et je réfléchissais à comment apprendre de toi son adresse sans éveiller tes soupçons. J’aimais ton manteau, mais enfin il n’y avait pas de quoi en faire un plat et puis cette histoire de meurtre remettait à demain mes projets de suicide ; je me demandais si je ne cherchais pas encore des prétextes. Je me remémorais certains passages admirables du code pénal et soudain tes allusions sur l’attirance suspecte que je pouvais exercer sur les pédérastes. J’aurais voulu t’expliquer que je n’y pouvais rien, que je ne faisais rien en ce sens, que j’étais l’objet d’une cabale, le jouet de forces hostiles et étrangères, et que tu ne me méprisasses pas ; que tu ne te méprisses pas sur mes intentions ; te convaincre que le courage ne me manquait pas pour me foutre en l’air. J’étais heureux de t’avoir à moi, rien qu’à moi à mes côtés. J’avais préféré froidement te dire que tu pouvais me laisser là, que le chemin de la gare était indiqué à présent, que je ne pourrais plus me perdre, que ce n’était pas la peine que tu prisses sur toi de me raccompagner jusqu’au bout. Tu avais insisté pour que si et je me faisais la réflexion que mon cadeau devait peser lourd dans ton sac. J’avais peur que tu le détestasses pour cette raison, que tu me vomisses pour avoir poignardé l’autre et de rester derechef sans plus de nouvelles de toi avant de recevoir un faire-part concernant ton décès récent qui me coûterait cher en couronne de fleurs blanches et un jour de repos à m’ennuyer à l’église à défiler en dimanche derrière ta famille à assister à tes funérailles. On s’était quitté face à l’entrée de la gare. J’étais bien. Tu frissonnais. Je me posais des questions sur ta volonté si franche de me raccompagner jusque-là ; je m’efforçais de deviner si je pourrais compter sur ta présence le jour de mon procès, si tu n’intriguerais pas encore contre moi, si tu ne me trahirais pas en témoignant en ma faveur, si tu ne travaillais pas déjà en bonne petite ouvrière à ma liquidation du jeu naturel et social. On s’était dit au revoir. Tu avais attrapé mon épaule et ta main était légère. À l’angle était un kebab ; j’avais faim et cru un instant que tu t’apprêtais à me dévorer, à me pousser du haut escarpé d’une falaise. Je t’avais prise par la taille et on avait appuyé les côtés de nos visages en faisant claquer nos lèvres. Tu m’avais souhaité de passer de bonnes fêtes ; c’était aimable de ta part et je t’avais répondu oui c’est vrai que c’étaient des choses auxquelles moi je ne pensais guère mais que oui effectivement il convenait de se souhaiter de passer de bonnes fêtes. On s’était dit au revoir, j’avais cru sentir que tu eusses aimé que je t’embrassasse sur la bouche mais j’avais froid je crois ; et puis je crois que non en fait, que tu m’en aurais voulu d’essayer d’introduire ma langue entre tes dents, sans compter mon invraisemblable mauvaise haleine de tabac. Tu étais partie vite et j’avais fait exprès de ne pas me retourner. Je m’étais retourné ; ce n’est pas vrai que j’avais tellement froid d’un froid à ouvrir les murs. Je m’étais tourné mais trop tard et je n’avais pas pu te voir mourir avec l’hiver au coin de la rue. J’étais bien, je pensais à ton manteau mais tu étais déjà loin partie regagner ton logis où t’attendait l’autre qu’on retrouverait demain mort assassiné je ne savais pas encore exactement où. J’avais commandé un grec et pris mon train ; avant cela je t’avais dit qu’on se verrait après les fêtes parce que tu repartais dans ton pays les passer avec tes parents qui enterraient justement ta sœur ou Dieu sait quel membre obscur de ton intarissable vieille famille franquiste. J’étais rentré à la maison me raser pour me faire beau pour les fêtes, pour toi après les fêtes. En me rasant, par mégarde, j’avais manqué de peu de me taillader les veines des poignets.

Il me semble bien ne plus avoir jamais eu aucune nouvelle de toi. Je ne me suis pas inquiété outre mesure : sans doute, me suis-je dit, tu te seras jetée par la fenêtre découvrant l’autre les tripes à l’air son corps sans vie gésir sous un hall mort d’un assassinat que je n’ai pas revendiqué. En somme tu m’as évité bien du souci. Je n’ai plus jamais eu à ne pas répondre aux interrogatoires que tu ne m’as plus fait subir. Bien sûr, depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les falaises effilées du haut desquelles j’ai couru et sauté en pensant fort à toi en ouvrant mon ventre contre la roche en égarant mon visage en me brisant les os.



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Glauque, toxique, informe, saisissant de lumière filtrée colorée et de pure beauté, Méduses met en scène un narrateur aux prises avec des femmes, un ami d’enfance mal en point, une mère qui se dérobe. Un texte puissamment ouvragé, drôle, grandiose et incomplet.

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