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Foyer à ciel ouvert de littérature contemporaine européenne

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Précisions

lundi 15 octobre 2007

Le cycle pyrénéen de Jean Figerou publié ces dernières semaines trouve ses limites (5 textes en 8 épisodes) et son nom : Cimes en abîmes.

La harangue aux auteurs a été renouvelée.

« Le Dit du temps haut », de Jean Figerou

lundi 24 septembre 2007

Le soleil se lève comme une honte dans la vallée.

Figerou fait parfois, devant la beauté, s’abîmer la pensée ; soit elle se rompt à force de tension, et bat la campagne, soit elle s’humilie et se replie sur elle-même et se contredit ou se répète. Il nous fait justement le coup à force de sublime en commençant ce texte qui met fin, provisoirement en tout cas, à son cycle pyrénéen, avant de poser la question : « Où ? La plaine pollue l’âme de ses miasmes, la montagne étire trop l’âme vers l’éther. Où vais-je me poser ? » et d’y répondre. L’odeur douce de l’aimée absente accompagne.

« Le Dit du temps haut », de Jean Figerou

Jean Figerou : « L’Agriculture en pot et sans potiron »

lundi 17 septembre 2007

Enfin ces tomates ça nous a valu que pluie de moqueries. Ça nous a dissout l’orgueil.

Hache publie une miniature de Figerou, 2 pages rougissantes toujours du même ensemble en construction. Lundi prochain, du lourd, du final.

Jean Figerou : « L’Agriculture en pot et sans potiron »

« La Première Dernière Balade » de Jean Figerou

lundi 3 septembre 2007

Je me demande si la montagne nous aime. C’est idiot bien sûr mais je me le demande ? Je souffre tellement à la gravir, je me demande si elle m’en est reconnaissante ? Je crains que ce soit illusion, y a rien de plus dur que la pierre. (…) D’ailleurs qu’importe qu’elle ne m’aime pas. Il y a infiniment plus de joie à aimer qu’à être aimé en amour. Je suis une fournaise de soleil dans mon malheur ascensionnel. Je souffre tellement que je ne peux l’aimer qu’à déborder. Je souffre le miracle. Aimer c’est avoir le feu dans le ventre, c’est être supplicié de bonheur en enfer de joie incandescente. Être aimé c’est juste un peu de sucre sur le gâteau en cerise, c’est pas l’essentiel.

Au début ça paraît long ; on s’engage et à peine engagé on se sent déjà fatigué. Empêché par une sage fierté de faire demi-tour, gentiment on prend le rythme, on se détend, on se réveille, la joie monte. C’est comme l’ascension d’un 3.000 et c’est la troisième étape du circuit pyrénéen de Figerou, dont le narrateur, après le berger obsolescent et la veuve tapageuse des deux étapes précédentes, pourrait cette fois être l’auteur, alpiniste du dimanche, ami du sublime mais à la condition physique un peu juste.

La Première Dernière Balade, de Jean Figerou, en deux épisodes publiés ce jour.

Jean Figerou : « La Lune d’Espiau »

lundi 27 août 2007

C’est toujours malheur la montagne mais surtout cette montagne-là elle l’est en grand, c’est écrit dans ses pierres. Elles sont noires d’être trop blanches. Surtout à la lune mauvaise. D’ailleurs personne n’y monte à la lune mauvaise. Ça hallucine trop là-haut.

Avec La Lune d’Espiau, en deux épisodes publiés ce jour par Hache, Jean Figerou poursuit dans la veine pyrénéenne de Hourquette d’Ancizan. Tragique, radotage, faux proverbes, vraie gnaque, et la saloperie de modernité dans le fond.

Autour de Hache

mercredi 13 juin 2007

Méduses (Hache 2005) d’Antoine Brea est republié au Québec par Le Quartanier. Signalons aussi dans la foulée qu’Alban Lefranc (La Vraie Vie, Hache 2001) a publié en 2006 Des foules, des bouches, des armes chez Melville Éditeur.

Jean Figerou : « Hourquette d’Ancizan »

mercredi 28 mars 2007

On est pittoresque. Tout à l’heure on était que des brebis galeuses maintenant on est pittoresque comme un dépliant touristique et bientôt on sera exotique comme un cul caraïbe vahiné dans leur réserve. On est l’indigène de service à l’étal. Ils vont nous planter trois plumes dans le cul, nous mastiquer des tatouages de serpent, nous faire manger des chenilles, nous broder des jupettes en raphia à l’ouvroir et nous faire danser à la nègre les jours de pluie ces saloperies de fonctionnaires gradés.

Tout en gravissant avec peine la « hourquette d’Ancizan » (col de montagne), forcé de compléter par quelque cochonnaille le régime démobilisant qu’on lui a prescrit — « Vraiment toutes ces saloperies-là de végétaux, ça ne vous nourrit pas un homme. » —, un berger pyrénéen sexagénaire évoque sa situation difficile, les fonctionnaires du ministère, l’ours slovène, l’immigration, et la splendeur de ses bêtes ensonnaillées qui paquent sur le pla.

Drôle, franc, bagarreur, lumineux, le texte est livré en 2 épisodes paraissant tous deux aujourd’hui, et suivi d’un lexique de haut gascon (paquer = paître ; pla = plateau).

Jean Figerou : « Hourquette d’Ancizan »

Paul Kodama : « La Feuille sacrée »

mardi 27 mars 2007

Les douaniers te cueilleront sur la passerelle. Mademoiselle, s’il vous plaît. Un jeune homme en civil te demandera ton passeport. Il t’emmènera au fond d’un bureau exigu. Tu penseras le séduire peut-être. Tu te diras, quelle chance, ce garçon si gentil ! Ses mains propres n’auront rien de commun avec celles d’un paysan inculte. Il te posera des questions. Tu ne sauras pas répondre. Il insistera. Tu écarquilleras tes yeux, déçue par ce manque de tact.

Hache publie La Feuille sacrée de Paul Kodama. Reprenant l’univers sud-américain de « Derrière la vitre » (nouvelle du même auteur, Hache 2005), ce texte bref déroule un drame ordinaire de l’émigration malheureuse, vu et prévu, depuis le pays d’émigration, par un narrateur occidental décadent.

Spitzberg, épilogue

lundi 13 février 2006

On tiendra pas cinq minutes de plus. On est en congère. Faut lancer un SOS et évacuer le navire.

Épilogue de Spitzberg : la « fortune de mer » redoutée et pressentie, avec un autre équipage. Le texte perd son narrateur, quitte son intériorité et remonte – en même temps que le bateau menace de sombrer – à la surface.

Spitzberg de Jean Figerou : avant-dernier épisode

lundi 30 janvier 2006

Aucune peur ne se lève, c’est comme si nous touchions l’innocence dans une euphorie froide et donc mesurée, mûre, infiniment adulte, la cervelle ivre de glace mais le corps toute mesure, tenue et retenue, planté sobre de tout désir.

Huitième épisode de Spitzberg de Jean Figerou, où se conclut le voyage accompli par le narrateur et ses camarades autour de Svalbard. On fait face enfin à l’ours fantasmé, et on est saisi d’une prémonition. Le texte lui-même se conclura la semaine prochaine avec un épilogue.

À noter aussi quelques ajouts dans la page des échos critiques, concernant Spitzberg et le texte de Saulnier publié la semaine dernière (L’Amie). N’hésitez pas à nous envoyer vos contributions.

« L’Amie » de Bernard Saulnier, page Critiques, suite de « Spitzberg » de Jean Figerou

vendredi 27 janvier 2006

1. Bernard Saulnier : L’Amie

Je fais une soupe, on la partage tu parles comme une intime des puissants. Ça m’irrite et c’est pire quand tu commences à chanter. Je récite le Notre Père devant la télé, je prie pour toi.

Nouveau texte de Bernard Saulnier, L’Amie évoque les fluctuations d’une relation amicale du narrateur avec une jeune femme qui attend le salut dans la publication de son roman. « Y’a rien de réjouissant à montrer son orgueil dans de l’ouvrage de laissé-pour-compte », cependant. « Tu sais la nature fait pas d’artistes c’est elle l’artiste. Toi aussi dékoncrissée que tu sois tu te bats mais faut cesser. Je les vois partout les petits violents qui veulent te faire la peau. Moi j’habite le quartier des multi-poqués. Je me sens bien avec mes semblables dans l’arc-en-ciel de la misère. C’est un asile à ciel ouvert. »

2. Page Critiques

Hache a donc ouvert une page Critiques, qui accueille vos commentaires sur des textes publiés (et en contient déjà quelques uns).

3. Jean Figerou : Spitzberg (7)

La sterne arctique n’est qu’une boule de courage.

Suite de Spitzberg !

Costes chez Fayard, « Spitzberg » de Figerou, Gendron chez Zinc Editions

lundi 16 janvier 2006

D’abord une information : Fayard publiera le 15 février un roman de Jean-Louis Costes, « Grand Père », qui reprend le thème du récit publié par Hache (Mon grand-père, immigré fasciste raciste anti-français, Hache 2001).

Site consacré au roman

Ensuite, et après une brève interruption…

Là, devant, à tutoyer l’étrave une longue grève de sable, blonde et oblongue, à la conche parfaite, jusqu’au vertige. Et la mer de l’ourler de friandises d’écume. Cette plage de sable connaît le clair blond, le blanc, le lait, l’ocre, le jaune lumière, le beige doux, la nacre luminescente, le bleu, le beurre très frais et le rance et même parfois le rose jusqu’au sang du rouge. Mais seulement pour les cœurs purs. Elle n’en finit pas de s’allonger sous le vent, libre de toute glace.

Ensuite donc (chance !) c’est deux nouveaux somptueux épisodes de Spitzberg de Jean Figerou, qui lui non plus, certes, n’en finit pas de s’allonger. Beauté se densifiant et s’affinant encore des évocations naturelles, manoeuvres et mouillages périlleux, et inopinée et brûlante au milieu des glaces, la rencontre d’une jeune femme.

Signalons aussi, dans un registre plus léger, que la nouvelle de Sébastien D. Gendron Le feu est une invention de gonzesse, les vrais hommes vivent dans le noir (Hache 2001) est publiée dans un format original et illustré sous le titre « Miss Acapulco » par Zinc Editions, avec une bande annonce vidéo à consulter sur le site réalisée par Sébastien D. Gendron…

Jean Figerou : Spitzberg (4)

lundi 2 janvier 2006

Le temps est blond, le courage de glace. Demain s’ouvre.

Suite de SPITZBERG.

Jean Figerou : Spitzberg (3)

lundi 26 décembre 2005

Entassés, délabrés, encaqués, moisis, ils vivaient culbutés les uns sur les autres sans jamais connaître le moindre répit de solitude, le moindre geste attendri, la plus petite volupté d’amour ou même de sympathie. . . C’était l’ère de la graisse cétacée. Le temps était à l’orgie. Partout des champs de dépouilles, des cimetières de cadavres, hommes et bêtes pêle-mêlés, des ruines de four à fondre le gras, de mini-villes pour mini-communautés hargneuses et bagarreuses. Vie d’enfer, dans un bagne permanent de gras, rongés de scorbut comme l’écrivent les tombes d’hommes et de cétacés mêlés sans fin sur la caillasse du crime au fond de baies ravagées.

3e et particulièrement bel épisode de SPITZBERG de Jean Figerou, qui revient sur l’histoire de la fréquentation humaine sanglante de l’archipel de Svalbard. Puis l’équipage s’arrête dans une cabane, repart, accoste à nouveau. Le paysage est décrit. Le narrateur mange une pomme, fait du pain. Quand tout à coup…

Ceux qui aimeraient s’y retrouver géographiquement peuvent suivre le parcours du bateau sur cette carte, avec les points de passages : Norvège (pas sur la carte), île aux Ours (pas sur la carte), cap Sörk, Hornsund, Bellsund, Van Mijenfjord, Longyearbyen, terre du Prince Charles, dépassement du 80e parallèle, Verlegenhuken.

À ceux qui sont sincères et qui sont sensibles, je souhaite un 2006 moins confus que 2005, même si je crains que les éclaircissements se fassent encore un peu attendre.

Jean Figerou : Spitzberg (2)

lundi 19 décembre 2005

La banquise est immense. L’heure est à la prière.

Suite de Spitzberg de Jean Figerou, qui alterne récit et contemplation et voit l’équipage, qui fait toujours cap au nord, atteindre l’archipel et le longer à l’ouest ; mettre pied à terre, prendre des risques, être méprisé.

Joyeux, ou pas trop pénible selon les cas, Noël.

Jean Figerou : Spitzberg

lundi 12 décembre 2005

La mer est longue. Et toujours cette gîte éternelle, tribord amure ! Mais quand ce bateau se relèvera-t-il ? Les estomacs maronnent. Ça joue pagaille dans les ventres. La mer jette ses paquets à la face. Trois jours que ça dure le petit calvaire, trois jours que l’on est parti. Certains dans l’équipage ont rendu leur âme.

Deux choses :

1. Jean Figerou : Spitzberg

D’abord, début ce soir du grand poème païen euphorique SPITZBERG de Jean Figerou, journal de bord stylé d’un « voyage en Hyperborée » (après ceux de Stephane Ilinski), c’est-à-dire au nord du nord de la Norvège et donc de l’Europe, dans l’archipel de Svalbard, autour de la banquise, « immense de corps et d’échos ». On y reviendra.

Svalbard vue du ciel

2. Vos commentaires critiques

Ensuite, sans volontarisme excessif ni intention de débat, Hache s’entrouvre aux lecteurs et invite les plus attentifs d’entre vous à nous communiquer de petits textes critiques concernant des textes publiés sur le site. Parlez de ce qui vous importe. Il est probable (obscurité des critères et totale absence de justification garanties) qu’ils seront publiés dans une page ad hoc.

À l’envoi, vous préciserez si votre critique, au cas où elle serait retenue, doit être publiée avec votre nom (voire email, voire lien vers votre site web) ou non.

On se réjouit de vous lire.

Antoine Brea : Méduses – 11e et dernier chapitre

lundi 28 novembre 2005

Tu suffoques d’être le plus repoussé des êtres, mais tu n’as pas un sourire pour autrui et sans arrêt soupires à propos de l’atrocité de ta position ou de ces grands rêves excédés qui te vandalisent.

On termine ce soir la publication de MÉDUSES d’Antoine Brea, avec, en épilogue, une lettre à Jimmy, double imaginaire du narrateur encore plus mal en point que lui, déjà apparu sous forme d’ami d’enfance, de frère, de la mort elle-même, mort lui-même et à présent interné.

La lettre relate un entretien du narrateur avec le psychiatre responsable : les sentiments de celui-ci sur Jimmy et son analyse de ses troubles vitaux. Magistral, parlant, d’une ironie délectable, le chapitre apporte au roman une conclusion ambigue.

Méduses – 11e et dernier chapitre

Antoine Brea : Méduses – chapitre 10

lundi 21 novembre 2005

Toute de pensionnaire vêtue, la mort racaille me demande si ça va. Ça va merci, et je continue. Dans la cuisine les odeurs sont louches, puant l’ail, l’urine, suffocantes. L’intelligence me pique mais ça banque. J’ai un peu mal à la cécité mais ok. À l’époque, m’adressé-je à la mort — maintenant clairement identifiée, sans l’ombre d’un doute, malgré mes yeux émondés —, à l’époque les filles sont veuves en général et les hommes massacrés.

Voici le très bel avant-dernier chapitre de MÉDUSES d’Antoine Brea, dense en écriture et en actions. Le narrateur, qui continue à reconnaître la mort dans le moindre de ses interlocuteurs, retrouve la « pensionnaire » (du trio précédemment évoqué), se confie à elle et lui fait un récit clé du temps de la guerre. Arrive ce qui arrive. À lire.

Antoine Brea : Méduses – chapitre 8 et 9

lundi 14 novembre 2005

Par convention je t’appellerai maman, de temps à autre si tu permets.

10 000 voitures brûlées plus tard, et après une interruption d’une semaine en ce qui nous concerne, Hache reprend ses publications avec une livraison importante, soit deux nouveaux chapitres inédits de MÉDUSES d’Antoine Brea. Dans le premier, le narrateur évoque un temps mal situé où, sortant d’un séjour supposé réparateur, il envisage rendre visite à sa mère ; dans le second cette visite se confirme, se répète, devient hebdomadaire, tandis qu’un étrange trio se forme par l’adjonction d’une aide à domicile engagée par la mère. Lyrique.

Antoine Brea : Méduses – chapitre 5 à 7

lundi 31 octobre 2005

Je ne suis pas vétérinaire, mais le sujet me paraît devoir être sanglé bien à l’horizontale, placé sous appareils à électrocution, calmé-choqué en tri-injections sublinguales, ramené loin de nos femmes et des habitations.

Suite de Méduses d’Antoine Brea avec les chapitres 5 à 7 (les deux premiers avaient été publiés en extraits, tandis que le dernier, le 7, comme tous ceux à venir, est inédit).

Chapitre 5. Une nouvelle jeune fille, qui conclut la série. Montée confuse et contrainte de son désir, évoquée-perçue de façon belle et délicate, et son dénouement. Puis nouvelle rencontre du narrateur, dans le métro, avec le morbide Jimmy Namiasz, frère / ami d’enfance / amant / double halluciné du narrateur : « Dans son sommeil, les yeux de Jimmy sont éteints. De grands phalènes viennent pourtant s’y poser, qui vivent dans les excavations. Jimmy les ôte mécaniquement, il les dévore sans se réveiller ce qui fait rire tout le monde. »

Chapitre 6. Le narrateur affronte Jimmy, identifié à la mort (c’est de lui que parle le narrateur dans l’extrait donné plus haut).

Chapitre 7. Début de la « seconde partie » du roman. Visite du narrateur à sa mère et à son père malade (mentalement absent). La mère a un problème avec son fils, le fils avec sa mère. Le texte reprend la forme « épistolaire », d’écritures « aux personnes qui existent » : « Je ne me sentais pas bien ma mère et, comment dire, ulcéré. »

Dans la langue, les écarts s’accentuent et se systématisent, à la fois précautions pour évoquer une névralgique intimité et outils pour l’approfondir et la transformer.

Antoine Brea : Méduses – chapitre 4

lundi 24 octobre 2005

Et il faut le croire, le lendemain tu marchais, loin de moi tête basse, des égards plein le corps, et sur la plage on s’allongeait, nus, à distance, nus pratiquement, hystériques, frigides comme des sphinx. Si bien que quelquefois je m’interroge : tout cela s’est-il vécu ? Dans ma matière instable là-haut n’ai-je pas fantasmé ?

Suite de Méduses d’Antoine Brea, avec aujourd’hui le quatrième chapitre, inédit (4 pages dans le format PDF compact proposé sur le site pour l’impression, soit une dizaine de pages en format livre).

Nouvelle saillie dans la mémoire du narrateur, nouvelle femme. Le narrateur va passer quelques jours de vacances dans un pays chaud, chez une amie récemment rencontrée. Est-ce la même femme qu’une de celles déjà mentionnées, mais avant ? On ne sait pas. Mais c’est bien le même narrateur, avec sa « matière instable là-haut » ; il arrive à l’aéroport, à grand peine traverse la ville en taxi et termine le chemin à pied, peignant tout de couleurs effroyables ; puis se présente devant elle, qui ne pouvait pas venir le chercher.

Antoine Brea : Méduses – chapitres 1 à 3

lundi 17 octobre 2005

J’avais contracté l’engagement, on s’était tailladé les veines et frappé dans les mains. […] À moi il faut dire il en coûtait si peu : j’étais un criminel en vogue, convaincu de meurtres sériels, l’Ennemi dangereux à la hallebarde, on avait retrouvé dans ma cave des morceaux de disparues de l’Yonne, je fascinais les foules, les schmidts étaient à la poursuite de moi, en plus j’étais récidiviste, plusieurs condamnations à vivre par contumace et j’avais pris perpèt’. J’étais le fils du néant, l’enfant au regard dévoré des méduses, celui dont ne parle aucune prophétie, dont le temps n’a pas gardé trace, un corps numéroté aux organes revendus à un prix sacrifié.

Glauque, toxique, informe, saisissant de lumière filtrée colorée et de pure beauté, voici Méduses d’Antoine Brea (Papillon, Hache 2000 ; Fauv, Hache 2001).

C’est son plus long texte à ce jour (environ deux fois Fauv ; un livre), et c’est aussi le plus dense ; moins clos dans sa forme que les deux précédents, mais plus aventureux et plus lourd d’affects et d’invention.

Le narrateur s’y débat avec des femmes, un ami d’enfance mal en point, une mère qui se dérobe, un père moribond. Tout ne va pas bien pour lui, et il n’est pas parfait. Mais le texte, qui le voit se tordre et menacer de se défaire, médusé par ces êtres comme autant de Gorgones, agrandit, creuse, transpose, donne à voir et fait rire ; c’est dans ce défi relevé et cette création, à nouveau, que réside l’exemplarité.

Des extraits avaient déjà été publiés sur Hache sous le titre Sphinx, incluant les 3 premiers épisodes publiés ce soir (d’où 3 épisodes d’un coup plutôt qu’un seul). Lundi prochain, on poursuit avec de l’inédit.

Paul Kodama : Derrière la vitre

lundi 3 octobre 2005

Hache est de retour avec Derrière la vitre, de Paul Kodama (La Nuit du chômeur – Une histoire dont vous êtes le héros, 2004, Hache). Pas d’extrait pour ce texte, en exergue de cette annnonce, comme on fait habituellement : vous comprendrez pourquoi en le lisant.

Stephane Ilinski : « Lettre à un neurologue installé »

lundi 30 mai 2005

Sous votre séant, sur le coussin de votre siège, sorte mauvaise copie-conforme Everstyl au blanc cassé crasseux à faire se repentir un publicitaire allemand, je vous collerais un, deux, trois Malabars.

Tandis que l’incertitude gagne les esprits et fait renoncer aux projets les plus grandioses, Hache poursuit dans sa « voie de la littérature » et publie aujourd’hui lundi 30 mai 2005 Lettre à un neurologue installé de Stephane Ilinski.

Confronté à ce qu’on devine être des révélations médicales préoccupantes, quoique ne le concernant pas lui-même, le narrateur de ce texte assez bref, tout en ne perdant pas un mot du discours médical savant qui lui est addressé, voit son esprit impuissant battre la campagne entre bonne blague qui rapproche et ultraviolence.

Jean Figerou : Dame pipi

dimanche 22 mai 2005

Parfois il y a des gens si beaux qui entrent dans mes toilettes que j’ai envie de les avaler. Parfois. Si. Mais c’est rare comme l’exception. Je les caresserais partout et les lécherais partout si j’osais. Ils enchantent toute la journée. C’est comme des oiseaux. Ils sont si beaux. Ils prennent tout l’air du ciel. Mais très vite on les oublie parce que le lendemain est lugubre, rien de beau ne vient pénétrer les toilettes et l’ennui nous habille alors toute la journée. On ronronne dans l’ennui du quotidien. Le jour est tellement morose qu’il est en dépression de lui-même. Si. On vit comme évacué, tout vide, sans rêve, on vit à petite mort. Pendant des jours et des jours il n’y a plus de soleil pour les yeux. C’est ainsi. On n’a à se mettre sous les lunettes que Momo qui est le plus petit des gardiens, qui est si malingre qu’il n’est qu’un bout d’homme. Il a toujours l’air d’un petit poulet tout rat bout gris. Sûr que c’est pas lui qui pourrait donner le change ! Ah malheur, malheur ! Il est plus laid qu’une vessie qui papouille ses rides. Dès que vous le voyez, vous avez envie de vous avorter. Quand il parle, on a toujours l’impression qu’il va remonter le cul de sa mère. Si. Dès qu’on le voit c’est pénitence.

Hache publie Dame pipi, de Jean Figerou, du même calibre, pour ceux qui s’en souviennent, que « Promenade promenée » (Hache 2004).

La dame en charge des toilettes d’un jardin public parisien y assume la fonction de narrateur ; on apprend pourquoi elle n’ouvre pas toujours quand ça devrait théoriquement être ouvert, le problème avec les clochards, son ennui et ses émerveillements.

Nulle sociologie, nuls « bons sentiments » ; la force gaie de la moquerie et de la vraie douceur, dans une langue pseudo-réaliste personnelle.

Bernard Saulnier : Beaver et l’Américain

lundi 21 mars 2005

L’Américain dit Dieu est dans ma vie. Il croit pouvoir surmonter toutes les épreuves. Moi Dieu je sais pas. Estie que j’m’haïs ! Beaver ! Haïs-toé pauvre carcasse. Ciboère que c’est toffe à soère.

Hache publie Beaver et l’Américain de Bernard Saulnier (Montréal), un auteur présent dès l’origine de Hache, mais dont on n’avait plus rien publié depuis l’été 2001 (le fameux été 2001).

Le narrateur, bénéficiaire de l’aide sociale, s’essaie au travail : il porte des caisses, tandis que son collègue, américain, conduit la camionnette. Il raconte, songe, se plaint, se reprend, synthétise : « Je suis qu’une oreille qui écoute délirer un camionneur américain. » Une voix l’apostrophe (« Beaver ! Beaver ! ») et le défie, c’est une jeune femme dont il se souvient : « Attends j’ai encore des choses à te dire ça fait pas mal de se faire sauter le cerveau. » Il évoque un « atelier de croissance personnelle », son père ; lâche quelques confidences isolées.

Un glossaire de joual (français canadien populaire parfois utilisé par Saulnier) est donné à la fin du texte.

Ciboère < --- juron (ciboire) que c'est toffe <--- dur, cf. anglais tough à soère <--- ce soir


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