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Foyer à ciel ouvert de littérature contemporaine européenne

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Cimes en abîmes

Jean Figerou

mars 2007

Hourquette d’Ancizan (1/2)

Les mots suivis d’un astérisque renvoient à un lexique (haut gascon) donné en fin de texte.

Oué, oué, oué, oué. Oué, oué. Oué. Enfin non plutôt pardi ! Je suis démangé de partout par le poids. Il me remonte le cervelet le problème et me butine l’âme à m’y tresser des méandres et me trousser l’humeur. Je me tire le cotylédon pour me déployer mais ça grince de partout. À chaque articulation le carrefour est bouché. C’est que je monte la hourquette* avec difficulté maintenant que je suis plus pansu qu’un roi mage ! J’ai la fourche trop ankylosée menue pour porter le fût.

Oué, oué, oué, oué. Oué, oué. Oué. Je parle, je parle, je parle, je suis parti à causer, je cause, je parle, je parle, c’est le malaise de mon âme qui sort en ce moment mais je suis pas friand de mots moi, je suis gourmand du goulot, j’ai toujours été très tendre pour la charcuterie. Pas que pour la charcuterie mais beaucoup pour la charcuterie tout de même. Pour le galabar, la saucisse de foie, le pâté de sanglier, le pâté de gras, la saucisssssssssssse de couenne. Et puis le dolent, la rillette aux grattons, le friton aux cèpes, le friand de fricandeau d’Aure, la ventrèche de montagne, le jambonneau écartelé au lard, le saucisson long, le jésus… Vous savez, je suis mortel moi sans charcuterie, je peux pas vivre, j’ai l’œsophage asphyxié sans lard, ça me lubrifie le moral la charcuterie. Ça me… Oui. Ça me coupe la parole.

Oué, oué, oué, oué. Oué, oué. Oué. Ça va pas. C’est pas que ça va pas ça va pas mais ça va pas bien. Ça va pas bien bien. Je suis pas fleuri, je suis tout fané. J’ai l’estomaque au rouge et le tempérament au bleu, c’est vous dire si c’est réjouissant l’ambiance dans mon corps. Ça n’a rien de suave. Je suis un recalé du plaisir dans ma vie maintenant. C’est ça qu’il faut dire, si il faut le dire. Des tomates, des haricots verts, de la laitue et même de la feuille de chêne, m’entendez, m’entendez, de la feuille de chêne il me faut ingurgiter, si c’est pas permis ça ! Le cochon il mange les glands et moi je mange les feuilles, si c’est pas malheureux vraiment de me faire avaler ça, c’est la honte ! Je suis le gland oui ! Je suis un cochon du haut !

Oh la la ! Des tomates, des zharicots verts et des feuilles de chêne à brouter ! Tout de même. Vraiment toutes ces saloperies-là de végétaux, ça ne vous nourrit pas un homme. Ça vous rumine c’est tout. Si, si, si. Ça vous rumine et puis ça vous ruine et après ça vous mine et ça vous lamine.

Et non et non, c’est que j’ai à grimper moi ! Je suis pas de la ville moi, la nourriture elle me tombe pas toute cuite dans le bec, faut que j’aille me la chercher et me la gagner en montagne et oui ! Et oui ! Eh tèh ! Et quelle que soit la saison, tèh pardi ! Alors si je m’enfourne pas un peu de charcuterie, je peux pas monter. J’ai pas des cuisses de bronze moi, j’ai pas le temps d’y aller à la musculation et à l’EPO et la testostérone et autres saloperies d’anabolisé ! Faut que je me les alimente mes cuisses pour les fortifier, me faut de la viande bien très rouge avec tout plein de fer dedans pour me la gravir moi la montagne ! Et c’est pas avec des haricots verts fricotés à la laitue que je vais me muscler de fer ! C’est que c’est pas le tout de le dire, faut y grimper en haut au cubilar*, c’est à des deux mille cinq à cent faut dire aussi. N’y grimpe pas qui veut, faut avoir le pied montagne, hé oui hé oui. Hé oui. C’est pas passe-temps. La montagne c’est notre pain au bout de la pente faut savoir. On est pas là pour la gonflette, la bronzette et la musclette nous, on est là pour la brebis nous, uniquement et entièrement pour la brebis, c’est tout.

Trois tomates et deux haricots verts ? Hé vous voulez que je dépérisse avant même d’arriver en haut à la pâture ! C’est ça, c’est ça ! Non je peux pas continuer comme ça, j’ai le corps tout chagrin. Tout laminé de faiblesse, je me vis chiffe très molle et chique toute démâchouillée. Si je veux accompagner les brebis il me faut le saucisson et le jambon dans la musette, sinon c’est même pas la peine que je fasse semblant de grimper. La machine ne montera pas sûr. Il me faut de la viande musclée pour monter. Et la viande musclée on se la fait en mangeant de même, en mangeant de la bonne viande té pardi ! Y a pas de mystère miracle.

Bouhhh ! Boudiou putaingue ! C’est qu’avec ce surpoids pondéral je fatigue, je fatigue. Je fatigue terrible à avoir l’angoisse de l’obésité. Parce que quand je redescends, faut que je les porte tous ces kilos de surplus, il faut. J’ai les reins en capilotade à la descendée. Ils s’assoient dans mon corps, si. Ils s’affaissent sur mon ventre pendant que mes rotules se noient dans la mare de synovie suée par mes capsules synoviales. C’est calvaire, je patauge dans la douleur à chaque pas. J’ai les reins qui n’arrêtent pas de s’affaisser, de s’affaisser, de s’affaisser à chaque pas. Mon ménisque quand on le voit à la radio, on croirait Dresde juste après les bombardements.

Putaingue ! Si c’est pas malheur ! Avec ce gros bidon que je me trimbale sur le ventre, que je suis si gros que je suis enceinte de moi-même. Le docteur il m’a dit que si je veux survivre, il faut que je maigrisse. Parce que j’ai déjà un pied dans la pierre tombale mais si je veux avoir les deux, j’ai qu’à continuer comme ça. C’est pour ça que j’ai entamé le régime depuis Pâques. Oui depuis Pâques, ébé dis donc c’est carême plus que Pâques hé ! C’est Carême tous les jours ouais ! Que ma vie a été que calvaire depuis deux mois, que j’ai mangé pendant deux mois que des tomates et des zharicots verts et toutes ces saloperies de légumes pour perdre que deux kilos. Ébé ! Ébé ! C’est vraiment la peine de se priver de mangeailles pour deux malheureux kilos de rien du tout ! Tout ce calvaire pour perdre que deux kilos c’est tout. Que j’ai brouté comme une chèvre des lichens potagers et toutes ces cochonneries de légumes sans cochon, sans la moindre charcuterie, la plus petite rosette de charcuterie, m’entendez ? Et tout cela pour rien ou quasi presque rien. J’en ai la tête en bouillabaisse. Qu’est-ce que c’est que deux kilos sur deux quintaux ? Hein ? Une insignifiance ! Juste quatre petites livres microscopiques, ça c’est pas vu tèh pardi ! C’était un blasphème au bon sens. Le jeu n’en valait pas la chandelle vraiment. Depuis Pâques c’est simple mon ventre neurasthénise. Il est tout en pagaille de dépression et me met le moral au talon. Parce que j’ai le champignon qui s’aime obèse. Alors le ramadan perpétuel au quotidien très peu pour mes maxillaires abdominaux. Tèh ! Est-ce ma faute si mon bidon il s’aime dodu, hein ? Hein ? Avoir fait tout ce ramdam dans mon estomac pour rien. J’en ai honte pour vous dire, j’en ai honte. De m’être fait avoir. Y a rien qui me pénètre la mauvaise humeur que des actes inutiles. Ça me barbotte encore dans l’estomac rien que d’y penser. Toute cette abstinence pour acquérir que de l’inutile. Ça me boursoufle l’exaspération. On est ni des cakes ni des rissoles que diable ! Et si je me préfère fessu et pas menu dans l’aigu ? Ah mais ! Si je m’aime à me conjuguer à tous les u, menu, fessu, dodu, pansu, ventru, aigu, pointu, charnu, cocu. Hein ? Qui peut y trouver à redire putaingue ! Non mais en quoi ça les regarde les commères et l’académie ! En quoi !

C’est mal fait quand même le monde quand je pense qu’il y a tant de gens qui meurent de faim pour rien et que moi je rêve de maigrir et que j’en grossis pratiquement tellement je suis affamé à me dégrossir alors qu’il y en a tant qui meurent d’être trop maigres à force de coucher avec la faim. Alors que je pourrais donner beaucoup de mes viandes tant j’en ai aux pauvres affamés tout maigres de Tchétchénie nègre. Ça serait tout bénéfice pour tous les deux. Moi je les nourrirais de mes bourrelets et eux ils me débarrasseraient de mes mauvaises graisses. Ça serait splendide. Et je me sentirais très utile. Ça me revigorerait le moral en plus de faire une bonne action, c’est toujours gratifiant. Surtout à si peu de frais et qui vous rapporte en sus à vous tartiner le miel dans le moral. C’est profit partout. Y a du génie parfois dans la charité. Et même de l’espoir. Ça vous revigorerait l’âme si ça pouvait se faire ce peut. Ça vous remmailloterait le quant-à-soi et vous déculotterait l’abstinence, ça serait que jouissance.

Et puis de toute façon ils ont toujours été un peu cannibales les affamés sous-développés, c’est leur régime quotidien de nourriture la barbaque humaine, ça les changerait pas trop, ils sont habitués, ça serait tout bénéf. Y aurait pas à les habituer à notre viande. Ça serait que du temps de gagné. Oh que j’aimerais ! J’aimerais bien nourrir tout un village avec mes viandes. Il y aurait des cliniques de gras et des dispensaires de cellulite et des hôpitaux à bouffe où seraient stockées les viandes dans de grands frigos géants régis par la Croix Rouge et le Croissant Vert avec de grands porte-conteneurs géants pour les distribuer à travers tout l’univers. C’est pour le coup que je m’aimerais bien redondant. J’en serais tout bedonnant. Gros par action humanitaire, obèse par charité. Si c’est pas beau ça, c’est tout réconfortant. Ça lui clouerait le bec à la médecine, ah mais !

Hé… ? À redire ? Après tout c’est mon droit de me désirer surabondant ventripotent ! Et après tout c’est ça le partage, la communion, la charité d’amour, le souci compassionnel du prochain et l’action citoyenne et l’échange nord sud solidaire et autres balivernes. Moi je le ferais en vrai en offrant mon corps à bouffer aux affamés de vie pour de vrai. Jésus il offre sa chair aux affamés de l’âme et moi je l’offrirais aux affamés de la faim, aux vrais affamés. Ohlala, ça me donne des couleurs rien que d’y penser ! Je jouis en arc-en-ciel.

Mais d’une certaine manière ils sont très avantagés les maigres, ceux qui meurent de faim, ils sont habitués, il y a des générations et des générations qu’ils souffrent de la faim, ils ont l’habitude et une longue expérience de l’épreuve et de la douleur. Tandis que nous les gens qui avons l’habitude de grignoter à notre faim, à déborder même, on souffre plus. C’est nouveau pour nous la faim. Et la détresse est plus grande. On est plus à plaindre en fait parce qu’on n’est pas riche de pauvreté et avare de souffrance. C’est des privilégiés les affamés, si. D’une certaine manière. D’une certaine manière on peut dire que c’est une chance de crever la faim pour les crève-la-faim, ils sont habitués comme ça et ils souffrent moins. Ohlala ça me déménage la tête toute cette histoire ! Parce que si vous aviez la moindre petite parcelle d’idée de ce que j’ai souffert en calvaire depuis Pâques, vous auriez pitié à trois genoux ! Un vrai chemin de croix.

Et si ?… Parce que par exemple si on pouvait remonter l’histoire comme on remonte une rivière ça me plairait, ça me plairait beaucoup. Par exemple je pourrais donner de ma chair à manger aux résistants à Dachau qu’ils ont tant souffert de la faim dans la guerre. Parce qu’il y a le frère de mon beau-père, il y a été interné concentré à Dachau pendant la guerre. Si j’avais pu lui donner un peu de ma viande, il aurait moins souffert. Ou tenez à Auschwitz à ce qu’il paraît qu’ils ont martyrisé les juifs à les faire partir en fumée ! Que c’était plus que la faim là-bas le calvaire, que c’était des cadavres vivants à ce qu’il paraît ébé tèh ! Ça les aurait soulagé un peu dans leur misère carbonisée de manger un peu de mes viandes, ç’aurait donné répit. On aurait fait une bonne action, on aurait un peu levé leur peine. Ça ç’aurait été de la résistance ! De la communion fraternelle. J’aurais peut-être même été consacré comme saint avec une médaille et tout. Enfin la médaille ça se mange pas, ça sert pas à grand-chose, juste à lubrifier un peu la vanité. C’est un peu vain. Mais la sainteté c’est un petit bout d’avance sur le paradis. Comme qui dirait une avance sur hoirie et des arrhes sur demain. Ça m’aurait complu beaucoup.

Enfin maintenant que je remonte à l’estive*, je l’ai cessé le régime. Je pouvais pas vivre mort. On ne peut pas travailler et faire pénitence en même temps. Remarquez, je ne dis pas que je l’ai arrêté, non je ne le dis pas pour plaire au docteur, je l’ai mis entre parenthèse pour l’été, je reprendrai la souffrance pour l’hiver. Faut bien que je m’offre un peu de répit dans le châtiment. Sinon autant se calibrer tout de suite du plomb à sanglier dans le groin pour en finir si l’on peut pas se masturber de plaisir le goulot aux délices de la bouffe. Hein ? Oui alors quand je grimpe à la borda* je m’emporte le saucisson et le jambon. Ça fait bon ménage le jambon et le saucisson. Surtout dans le ventre hihi ! Ça me satisfait, hihi ! Surtout quand il est croisé sanglier et haché gros grain, sans trop de gras mais avec quand même et pas trop sec. Pas trop frais mais pas trop sec, juste dans le juste milieu quand il est goûteux juteux. Que c’est délice à vous faire grimper la langue au ciel. Je me mange la lichée de pain quand j’arrive au Pla* de l’Arcouade avant de me monter le Clot* des Cardous, je m’entame une rondelette jambonnée et me saucissonne le bonheur. Hé tèh pardi le régime, je me le suis jeté dans la ravine pour l’été, sous la doline ! Parce que gros ou pas faut y aller avec des forces à la pâture, qu’est-ce que vous croyez, croyez ?

Je suis bien avec le saucisson. C’est un compagnon pour moi. Parce que c’est le genou que je souffre. Pour monter ça va. Non pas de problème pour la montée. On souffle, on ralentit mais on y arrive, à son rythme. On met le temps qui faut mais ça va. Si c’est trop essoufflant on ralentit, on met le temps, mais on y arrive. Mais c’est la descente qui entame le rosaire. C’est ça la descente où qu’il souffre le genou, il connaît le martyre. Parce que quand on est gros comme moi c’est tout ce poids en sus qui lève la souffrance, vous comprenez. C’est le genou qui porte tout ce gros ventre et qui geint. Voilà. Et la douleur me lance. C’est pour ça que j’ai entrepris le régime pour m’affaisser l’œuf colonial. Mais pour rien en vain, je crains. La fragilité de l’homme elle est dans le genou. Enfin je veux dire pour le montagnard comme moi un peu excroissant de la bedaine. Plus je m’abstiens plus j’engraisse en fait. C’est pas de chance, je suis d’une nature trop généreuse. Et comme je m’aime beaucoup, j’engraisse beaucoup et mon médecin me fait misère. Mais attention je suis pas dans l’abus. Je goinfre pas. Juste un peu de saucisson pour tenir le parcours. Je suis plus dans le régime mais je ne suis pas dans l’excès non plus, je suis en demi-régime. Si vous voulez, je ne me cumule pas comme avant mais je me rassasie quand même. C’est le problème des gros, ils se dorlotent à la bouffe ; ils s’aiment trop alors ils se gâtent. Ils s’aiment tellement qu’ils s’adorent dodus, aussi pour avoir plus de viande à aimer ils s’efforcent d’être plus copieux en volume et pour prendre du poids ils cumulent les gras et s’accumulent en quintal comme ça ils ont plus de chair à aimer. C’est ça, les médecins ils oublient que les gros sont amoureux d’eux-mêmes. La thérapie elle devrait passer avant tout par l’amour, voilà ce que j’insinue en passant.

Remarquez les gros, ils font bien de s’aimer. C’est pas que l’on soit jamais mieux servi que par soi-même ! Quoique ?… Mais comme personne ne les aime du fait de leurs kilos en trop, s’ils ne s’aimaient pas, ils ne connaîtraient jamais l’amour les obèses. Alors ils font bien de s’aimer un peu et de se couver à la graisse pour ne pas neurasthéniser. Ils y ont grand intérêt parce que personne d’autre ne les aime qu’eux.

Le gras c’est démodé, ça répugne même à ce qui paraît. C’est le maigre qui tient le haut du pavé. On répudie la marmotte pour frayer l’idylle avec l’hermine aujourd’hui. L’adipeux ne trouve pas d’anneau à mettre à son goupillon, surtout que défois sous la voûte du bidon c’est pas facile à pénétrer le plaisir. Le gros c’est paria. Même la médecine est contre, c’est dire. Alors que le médecin en principe il est censé soulager la misère pas l’accentuer. Au jour d’aujourd’hui et de demain c’est une honte d’être gros, c’est même une insulte. Enfin c’est considéré comme. Et pourtant qu’est-ce que vous voulez que j’y fasse si j’ai le ballon ? C’est pas moi qu’il me le suis fait pousser, il a poussé tout seul comme le champignon. Je le subis, c’est comme la famille. Je dis toujours mon ventre c’est pas moi, c’est la famille. C’est mon petit-fils que je me suis fait pousser directement dans le ventre. Et il en est épais. On en fera un grand montagnard de ce petit.

Parce qu’on a beau dire quand même le gras c’est la fête et la graille de la joie. Ce n’est que ça. Parce qu’on n’a pas des vies tellement vivantes alors si on a plus la bouffe, qu’est-ce qu’il nous reste ? Je vous le demande. Oui. Parce que moi je sais pas où ils se le foutent le courage mais moi je le mets dans la viande le courage. Il me faut de la viande moi pour l’avoir le courage. Sinon je dépéris. J’ai le muscle qui dépérit sans viande bovine et charcutée.

Je m’y fais pas moi au temps d’aujourd’hui. Boudouoiouhhh ! Je suis d’avant moi. Tout est si rapide maintenant que tout dépérit avant de naître. Non je suis très très d’avant moi. D’un temps où l’on regardait pas l’heure mais où on l’écoutait au clocher de l’église sous la bénédiction pieuse de l’Angélus. Le temps d’avant il était plus épais, que maintenant il ne sait que couler et couler et couler et couler. À se noyer dans l’inutile. Oui, je parle d’une époque où le temps était lent, où les choses étaient solides et longues. Un temps où l’on avait le temps de voir venir avant de décider. Qui vous prenait pas au dépourvu, qui était honnête, où l’on savait où on allait, sans être gadgétisé chaque semaine par une nouveauté quand on va prier les courses à l’Hypermarché. C’est qu’au jour d’aujourd’hui et encore plus au jour de demain, il y a plus de curé à la montagne, il y a plus que des vendeurs. C’est l’hypermarché qui a remplacé l’église maintenant et la communion elle se fait au portefeuille.

Oui, aujourd’hui les gens préfèrent les choses neuves, l’attrait c’est la nouveauté aujourd’hui. Autrefois c’était plutôt l’ancienneté qui était consacrée, les choses qui avaient fait preuve de leur aptitude à durer. C’est tout le contraire aujourd’hui où qu’on est coquet que du neuf. C’est comme l’eau, tout le monde a l’eau courante, nous aussi on l’a au robinet mais pour boire pour le midi je vais la prendre à la fontaine au village, elle est plus neuve à la fontaine, elle court tout le temps. Voyez moi aussi je suis moderne, j’aime les choses neuves quand il faut de raison !

Ouhhh ! J’ai la tête dans un pot. Quand je pense… Ça me piétine l’estomaque encore rien que d’y penser aux tomateszaricots verts, ça me met l’esprit en vermicelle. Ohlala putaingue !

Oullala je cause, je cause mais on va se faire saucer ! La prade* va pas tarder à jouer à l’éponge. Le temps glisse vers le mauvais. La climatologie va faire trempette dans les dix minutes. Ça va charrier gros. Le nuage est déjà descendu sur la raillère, qu’il fricote avec le pierrier. Faut que j’ôte le sel aux bêtes. Parce qu’elles vont se mouiller les bêtes sous la pluie et si mouillées elles lèchent le sel, elles crèvent, oui, oui. Que je le retire, vite, vite. Elles en sont friandes mais ça leur porte le mal c’est qu’elles en abuseraient facile. Le Marcel il se saoule au vin, elles elles se saoulent au sel. Oui c’est danger le sel si trempées elles en absorbent, elles en meurent. Mais elles ne peuvent pas se retenir, elles en boufferaient à se péter la santé. Le sel il leur est nécessaire mais c’est surtout friandise pour elles. Elles adorent se saler le plaisir. C’est comme nous que voulez-vous, on adore la charcuterie, on en mangerait à se péter la sous-ventrière et que ça nous fait un mal à l’infini qu’il dit le docteur d’Arreau alors il vous met aux zharicots verts, quelle misère ! Vous avez pas remarqué ? La vie est calvaire. Tout ce qui est bon, tout ce dont on est gourmand, vous nuit à la santé. C’est mal fait le monde. Il a pas bien travaillé le Bon Dieu, non il a pas bien travaillé, c’est pas un succès. Je ne saurais le féliciter. Tout ce qui est bon, le gras, le jambon, la sauce est nocif. Ce qui est délice, vous fait monter la pression de l’artère et vous grignote au cholestérol ! C’est très mal fait que voulez-vous. Un type qui travaillerait comme ça dans le privé, il serait vidé le jour même avant même d’avoir commencé. On lui laisserait pas le temps de commettre tous ces dégâts. Non. Non.        Non.

Tomateszaricots quelle damnation quand j’y pense, ma joie en est défunte. C’est qu’il faut les déloger à coups de bâton et de chiens de la pierre à sel sinon elles continueraient à les sucer même en chiant tant ça leur fait glousser le plaisir le sel. Elles en crèveraient sur place plutôt que de s’arrêter de sucer les salopes.

Et ça ? Ah putain de gembres* ! Que je m’emmêle les pédales du bas en roncier. Putain de genévriers et saloperies de rhododendrons de merde putaingue ! Qu’autrefois y avait des quinze mille bêtes ici à gambader sur les Quatre Véziaux entre le Pla* de Castet, le Pla* d’Arcouade, le col de Crabe* , le Clot* de Pourtillou et l’Aoubère. Des quinze mille têtes, oui ! C’est pas comme maintenant que j’en conduis des cent cinquante à tout casser, que c’en est une misère. Parce que… Y a pas mystère. C’est simple. Jeannot il arrête cet automne, il a doublé les 73 ans hé ! Et moi que je vais pas tarder à me la saisir la retraite. Et on n’est plus que deux. Alors quand on va partir qui c’est qui restera dans la montagne, hein. Qui c’est ? Plus personne thè pardi, que le vent. C’est tout. C’est tout. Etèhhh ! Évident. Que ça pousse partout cette charogne de genévriers et de rhododendrons. Qu’y en avait pas un, pas une touffe autrefois jusqu’à des deux mille cinq cents quand toutes ces bêtes paquaient*, que maintenant c’en est tout plein, tout garni que ça me fait mal. C’est plus une estive, c’est une garrigue maintenant. Elle est toute dépeignée de buissons l’artigue*. 150 bêtes, qu’est-ce que vous voulez, c’est ça qui va empêcher le genévrier de s’ébattre tèh ! Parce que s’ils croient que je vais aller tondre la montagne comme une pelouse en banlieue, ils se gavent le gave*. J’en ai assez de travail comme ça. Parce que j’ai pas d’aide. J’ai pas d’aide ! Surtout que le chien que j’ai il court plutôt le papillon que la brebis et l’autre, le labri-colley, il se trousse plus le bâton de berger qu’il ne taille les bêtes. Ils sont plutôt traîtres du collier tous les deux. Alors c’est moi qui me remonte toute la pente des bêtes à remonter et qui me trace la sente. Et je me sens tout dépareillé du genou.

Parce que de qui qu’on se moque hé ? Vous avez lu la Dépêche ? Vous l’avez lue ou vous l’avez pas lue ? Que c’en est une honte, une honte ! Pour ramoner la montagne au mouton, pour la jardiner comme ils disent, ils proposent des quenottes de chardon. Une prime annuelle annuelle. Et annuelle de 700 euros. Ils nous prennent pour des émigrés ou quoi ? Ehé tèhh pour eux on n’est que des émigrés dans notre propre pays. Attendez, attendez, on va se déboîter le genou pour 700 euros l’an ! Faut pas se moquer à ce point que ça frise l’injure ! Que ça la déborde même. On est plus des gosses, on a plus l’âge des sucettes à 64 ans. C’était dans la Dépêche ce matin ! Vous avez pas lu ? Vous avez bien fait autant pas lire la honte écrite noire sur le blanc. S’ils croient qu’ils vont en trouver des jeunes à 700 euros par an à 20 fois moinssse que le RMI ? Autant s’asseoir au bord de la route à compter passer le temps ! C’est qu’ils nous feraient boire la Garonne ces enculés ! Ils adorent subventionner la misère ces brebis galeuses. C’est pas eux qui se la grimpe la combe à se compoter les genoux à se les désosser. Ils se lavent les yeux avec notre soupe ces mécréants. On demande pas l’aumône, on demande d’être respecté dans notre labeur, c’est tout. Déjà qu’on a une vie de chien, on ne voudrait pas être pris pour des ânes, on n’est pas des chevaux à mules ni des tartines à gazon. Ouhhhh ! Tous ces genévriers ça me remonte le cœur dans le foie de voir ça et ça me dégueule le désir. Je suis comme tout en malaise lorsque je vois ça. Enfin qu’ils comptent pas sur moi pour aller peigner le pré alpin à ma retraite pour 700 euros l’an. Mais de qui on se moque ? De qui on se moque ? 

Un berger c’est que misère, c’est pire qu’une vie de mère. Parce qu’on se donne du mal pour ces bêtes pour rien. Pour rien. Que de la déception. En août dernier quand la foudre m’en a abattu quatre en une nuit ça m’a laissé un froid à l’âme pendant au moins un an. Un an que dis-je ? Pendant au moins deux ans ! Oh oui deux ans à temps plein ! Deux bonnes années. À les pleurer dans le silence de mon âme et la solitude blanche des monts. Je m’en remettais pas. C’est pas qu’on soit sensible mais c’est dur, on couche pratiquement avec les bêtes toute l’année nous faut dire. On les connaît mieux que nos enfants. J’avais beau me raisonner, j’avais la sentimentalité en débandade et le cœur en jus de chaussettes. Ça me revenait tout le temps du temps. Parce que de toute façon faut pas s’attacher, les bêtes elles partent toutes à la boucherie, je me disais mais ça n’enregistrait pas la raison, je coulais que du sentiment que voulez-vous ? À vivre 24 heures sur 24 avec la bête on s’y attache. C’est plus fort que nous ! On ne se retient pas ni ne se refait que voulez-vous ! Hé oui ! Hé oui !

Non c’est pas une vie qu’on a, c’est pas une vie ! On est encensé à la misère nous autres. On n’est que des sauvages. On est les bagnards de l’herbe à cailloux. C’est pas humain ce qu’on vit. C’est que souffrance, que souffrance. Souffrance et affront permanent. Et ils veulent nous subventionner 700 euros pour l’an ? Mais c’est l’insulte directe à pleine face. Ça devrait pas être Dieu permis ! Putaingue ! Quand il viendra au canton le président de la Chambre d’Agriculture, je lui fous mon poing sur la gueule moi ! Attendez que pas plus tard que avant-avant-hier, l’Arbizon je le me suis monté à quatre pattes, sur les genoux que je l’ai achevé en bavant comme un lombric oui, pour gravir les derniers plus de deux mille huit qui m’ont achevé. Sur les genoux, oui que je suis arrivé, à quatre pattes, à brouter l’herbe carrément, tant j’étais épuisé par la tempête, et courbé de vent et avachi de fatigue pour aller me la chercher la brebis ! Putaingue que j’en aurais eu huit de genoux que je les aurais tous utilisés, je préfère vous le dire tout de suite ! Tout de suite. Je n’aurais pas manqué. Comme un ver que je rampais sans le moindre grain de dignité. Oh mama misère ! Que j’en avais honte à chialer. Heureusement qu’il y avait personne, que je suis toujours tout seul sur le mont. Ils auraient pas fini de me moquer. J’en aurais été crucifié de honte honteuse. Et ils veulent nous accompagner dans notre retraite et nous soulager la vie pour pas qu’on déprime pour 700 euros l’an. Ah les salauds ! De qui qu’on se branle à la Chambre d’Agriculture ? Y en a que pour ceussse de la plaine, ceusse qui chient le maïs et grignotent dans le fruit, à pas savoir qu’en faire, à dessécher la plaine, à nous voler l’eau de toutes nos nestes* et à nous polluer l’avenir. Y en a que pour eux. Mais ça va changer, ça va changer, on va leur larguer toute notre pollution sur la gueule, ça va pas tarder ! Ils vont voir ce qu’ils vont voir. On va les leur larguer en avalanche nos saloperies, non mais ! Ils n’auront plus qu’à les gober. On est pas plus cons qu’eux hé tèhh ! Les conneries ont sait aussi bien les faire. Parce que je ne vois pas pourquoi y aurait qu’eux qui auraient droit de polluer dans la plaine ? Je ne vois pas pourquoi, on est en démocratie. Et on saurait être aussi cons qu’eux putaingue ! Ils ont le toupet d’appeler ça de l’agriculture ! Moi j’appelle ça de la pollution tracteur mazoutée à l’engrais, abreuvée à la sècheresse et engraissée au phréatique.

Ça va se terminer catastrophe tout ça. 700 euros qui vous pissent le malheur ! Parce que plus personne ne va vouloir y aller à la montagne à ce prix-là. Plus personne. Ça va être un désert la montagne, une jungle. Parce que c’est nous qu’on l’entretient la montagne avec nos bêtes. Si y a plus de bêtes la montagne elle se dégénère en désert. Ça sera plus qu’érosion et érosion le mont. Ça va être raillère, ravine et éboulis éboulé et pierrier, que des pierres et des pierres et des pierres. Ça va être le hoggar le Néouvielle dans ce cas-là. Si c’est ce qu’ils veulent autant le dire tout de suite. Autant essayer de faire pousser du cresson sur le caillauas* et du gazon sur le crâne à Mathieu mon Dieu. Ils vont la laisser se dégrader en Arizona la montagne ces cons de politicards. Parce que qu’est-ce qu’ils y connaissent à la montagne hein ? Qu’est-ce qu’ils y connaissent ? Y s’y connaissent mieux que nous peut-être ? On aura tout vu. Je voudrais les voir moi monter des 2500 tous les jours et même plusieurs fois le jour parfois défois. Parce que putaingue c’est pour le coup qu’ils auraient les genoux en décapilotade avec les ménisques en purée. Même qu’ils auraient plus de genoux. Plus rien du tout même.      Déjà qu’ils ont pas grand-chose.

Parce que vous comprenez, c’est des moinssse que rien. Ils ont pas la tête à la culture et encore moinssse à la culture de l’agriculture au Ministère de l’Agriculture. Ils ont jamais eu le temps à l’agriculture en faite bien qu’ils soient du Ministère de l’Agriculture. Ils ont plutôt la tête à la paperasserie. Ils ont le sang juridique, pas vinicole ou céréale. C’est ça aussi qui fosse se dire. Parce qu’ils sont venus ces messieurs de l’agriculture faire un rapport, rapport à la subvention demandée. On les a amenés à l’estive en haut, au grand Corbeau, tout en haut du haut, au-dessous du verrou pour qu’ils se rendent compte bien. Mais ils n’ont pas voulu, ils étaient épuisés rien que d’y penser. Enfin bon, trêve de paresse ! On avait pas passé la Coume de la Maboué que déjà ils miaulaient ces gens du ministère départemental que c’était haut haut, haut, qu’ils voyaient très bien de là de quoi il ressortissait et patati et patata. Bref on a abrégé à la racornir la visite quand le chef très gradé de la délégation me demande par politesse sans doute : « C’est à vous ces vaches ? Belles bêtes. » Je me retourne étonné, je regarde partout pas une vache, je ne vois pas la moindre vache de toute la combe. Traînant mon regard partout à m’oblitérer le regard sur toute la oulette* et ne voyant rien, je finis par suivre son doigt censé me montrer les vaches et je tombe sur mes brebis. Ebé ! Ebé ! On est bien servi avec une telle engeance pareille. S’ils savent pas reconnaître une vache d’un mouton ! Et qu’ils sont du Ministère de l’Agriculture, en principe spécialisé dans l’élevage en haute montagne ébé ! C’est pas brillant, brillant ! S’ils ne savent même pas reconnaître une vache d’une brebis, ébé ! Où qu’on va ? Ebé ! Et cette genssse-là elle est censée vous donner des conseils en agriculture ébé ? Bon, vu ce résultat brillant on est rentré. On était cumulé en tas, on peut dire, dans le véhicule de la préfecture. On était plus serré que brebis en troupeau, c’est dire. On aurait pas pu glisser un doigt entre nous. Oui, il y avait même pas la place d’un doigt entre nous, c’est vous dire si on était sardines. Enfin on est descendu de la pâture, on est arrivé au village et depuis la subvention on l’attend toujours. Non mais confondre des vaches et des brebis quand même, elles étaient à 300 mètres les bêtes, mais quand même ? Ils confondraient une pintade avec un lagopède ! Des incapables, des incapables ces salariés fonctionnaires du Ministère de l’Agriculture ! Si c’est pas malheureux ça ! Et ça nous gouverne ça ! C’est censé nous gouverner, ébé ! Ça nous augure-préfigure des lendemains désenchantés. Ebé miladiou !

Je comprends pas d’ailleurs ce qu’on lui a fait au gouvernement pourquoi il insulte comme ça les bergers ? Je sais pas ? Parce qu’on vote pas pour lui ? On ne vote pas non plus pour l’autre, alors ?… Je sais pas. Mais avec des décisions comme ça le préfet il engendre le malaise et la désertification et des lendemains morts et des aujourd’hui plats. On dit qu’il est un peu débilote le préfet de par chez nous depuis que sa femme est partie fricoter avec un berger de par chez nous, il aurait la cervelle en vermicelle et le cœur plus sec que la Neste* de Louron en septembre ! Mais qu’est-ce qu’on y peut nous ? C’est pas parce qu’il est cocu qu’il faut nous en faire porter le poids. Enfin ? Parce que si la fesse interfère sur le politique maintenant, ça va être les Borgia en Bigorre. Boudigue ! Et nous quand même question études on n’est pas armé pour jouer les Machiavel !

À ce qu’il paraît, ils n’auraient plus d’argent pour l’agriculture de montagne, qu’on aurait tout dépensé le budget. On n’a rien vu venir mais on aurait tout dépensé. On en a pas vu le moindre dégradé de couleur, même pas l’once d’un grain de sable mais l’argent se serait évaporé dans les arizones*, comment ça peut se faire ce peut ça ? C’est la tempête de l’automne qui aurait tout emporté le budget. Enfin ! Moi je crois que c’est peut-être les vautours qui l’auraient volé au passage ou les petits Pères Noël multiples et autres associations de malfaiteurs d’élus ? De qui qu’on se moque, non mais de qui qu’on se moque ? C’est fou ce que ça part en passoire, l’argent des subventions ! Nous les crétins des montagnes, les émigrés des alpages, on est moins que des Arabes dans notre propre pays, au cœur de nos terres. De toute façon il n’y a pas d’argent pour nous, on est dans la crise et il n’y a plus d’argent pour les choses inutiles parce qu’on serait de l’inutile, on relèverait de l’assistanat des cimes. On n’est pas rien, on est moins que rien. La crise, la crise ! La crise elle a bon dos. Ça fait quarante ans qu’on est dans la crise et une crise de quarante ans, c’est pas une crise, c’est une permanence. Une crise qui dure deux générations, c’est peut-être un avenir bouché mais c’est avant tout une constante, un état normal. Un état malade, faible, fragile mais un état exactement dans la norme de la vie, ça devient l’ordinaire du quotidien. Parce qu’à les entendre, depuis plus de trente ans tout est crise aujourd’hui à travers le monde, c’est la mode. Mais y a pas plus de crise chez nous que d’Arabes honnêtes. Je le dis au pluriel parce qu’ils pullulent tellement, ils sont tellement nombreux chez nous qu’ils sont toujours aux pluriels.

Y a pas d’argent, il aurait versé dans la Neste* d’Aure. Mais ils savent en trouver pour le manger quand ils en veulent. Pour gaspiller l’argent pour des choses reines de l’inutile, ils sont bons. Pour faire un rond-point qui encule un rond-point qui encule un autre rond-point à l’infini du chapelet, ils sont bons mais pour aider les gens à vivre, c’est une autre paire de bœufs. Ça pour se mettre l’argent dans le gousset en faisant des ronds-points, ils sont bons mais pour la brebis tintin. La Bigorre on tient déjà le record européen des ronds-points, qu’est-ce qu’ils visent ? La coupe du monde ? Pour s’acheter des bombinettes pour se les faire péter à la gueule comme les gosses qui jouent avec les pétards, ils sont experts en la matière mais pour aider le mouton à sauver les montagnes pas la couille d’un radis ces enculés du bulletin de vote. Qu’est-ce qu’ils cherchent ? À faire éclater toute la terre ? C’est sûr que tous les problèmes seraient résolus par suicide génocidaire à vitrification intégrale.

Ah pour le mouton y a pas d’argent mais pour l’ours ils l’ont trouvé l’argent, ils en ont trouvé de l’argent ! Mais pour nous qu’on est que des déchets humains, absolument obsolètes, genre fossiles archaïques, que des cailloux et des coulées de pierres en avalanches. Ils en ont planté putaingue des pots de miel dans la forêt pour séduire le plantigrade. À croire que le miel ça pousse dans les arbres. Mais attention, attention, il ne me séduit pas moi l’ours ! Attention, j’en ai pas tentation. Si jamais je me le trouve, je me l’embroche avant qu’il ne me génocide tous mes moutons en ravage de pacage. Pour le superflu, pour l’animal d’agrément des Pyrénées, pour l’ours, ils en ont des pépettes ! Mais pour la vraie agriculture queue de singe. Pour faire garniture dans le paysage ils inaugurent l’animal sauvage de compagnie, l’ours slovène. Pour jouer à la Marie-Antoinette couvant la bergère l’argent coule à flot que c’en est indécent. Faut voir : hélicoptères, préfets, sous-préfets, en régiments, conseillers généraux, conseillers régionaux, présidents en batterie, vice-présidents de mes deux, escadrons de gardes mobiles, compagnie de CRS, etc, etc, etc… Le pré en était gras d’huiles. Putaingue ça me démange et me fourmille la haine, putaingue ! J’en ai l’impôt sur la vessie ! Putaingue !

Attendez, attendez ! J’attendrai pas hein ! Si je le vois l’ours monter dans la combe, je lui donne chasse. Je me pose le saucisson et je lui donne chasse.

Attention c’est que je me le fais descente de lit moi l’ours. Le monde marche sur les oreilles aujourd’hui. Ils nous ont bassiné avec les droits de l’homme, les droits de l’homme par-ci, les droits de l’homme par-là. Bon je veux bien, je veux bien. Y a du bon là-dedans, y a du mauvais mais y a du bon. Mais maintenant la mode c’est plus les droits de l’homme, c’est le droit de la bête, les droits des animaux et des bébés phoques qu’on privilégie à nous enquiquiner les oreilles si bien que les droits de l’homme ils passent en second plan, ce n’est plus qu’ersatz de substitut de succédané dans les modes de la conscience ! Même que les gens sont devenus les esclaves des animaux par sentimentalisme. L’homme est devenu le fervent servant de l’animal qui doit être reconnu dans tous ses droits de roi, même aux dépens et aux détriments de l’homme, c’est la mode d’aujourd’hui. À les entendre ces sorcières de la bonne conscience animalière il faudrait sauver les puces, les poux, la tique et le chicungunia, toutes ces bestioles qui ravagent la joie de vivre de l’humain, c’est plus de la charité chrétienne, c’est du masochisme qui exporte son sadisme. C’est comme l’ours. Tout pareil. Tout pareil. Les gens ils confondent l’ours et le nounours. Il va falloir qu’un jour ils deviennent adultes, qu’ils arrêtent de se sucer le pouce et de convoler avec le nounours, la nounou, le doudou, le foufou et le chouchou. Ils ont oublié que l’ours c’est un carnivore frugivore. Remettre l’ours c’est introduire le diable dans la forêt. L’ours, qu’on a mis des générations et des générations et des générations à nous l’éradiquer depuis le Moyen Âge. Et à peine qu’on est arrivé à tout juste l’éliminer, voilà-t-y pas qu’ils nous le remettent. Si ça a du sens ça. Ils marchent sur la tête au Conseil Général. Ils ont l’esprit tout à l’envers. C’était la peine qu’on se donne tout ce mal pour le tuer si à peine exterminé ils nous le remettent. Se moquent de nos couilles ces écolos de ville. Ils nous prennent pour des myrtilles.

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Paysage 876 : Corse (2009)