J’attends le rush, j’attends que ça pousse, que ça flambe, que le crâne me saute et que ça cesse. J’entends de la musique Klezmer qui sort d’une camionnette transportant une cabane. P.L. a un corps de culturiste il discute beaucoup avec les femmes surtout dans les salles de billard luxueuses, il tente de vendre ses vêtements de cuir, le tenancier lui demande ce qu’il fait là il explique qu’il a rendez vous avec des amis. Un drap traîne au milieu de la rue. Qui l’a laissé là ? P.L. se rend dans une boîte de jazz c’est si beau si attrayant derrière la musique y’a toute cette faune de paumés de personnages lubriques et excentriques. À force de vouloir revivre des instants magnifiques P.L. passe de catastrophe en catastrophe. Un jour il déménage l’autre il emprunte de l’argent. C’est le quarante troisième automne de P.L. Il n’a jamais migré. P.L. m’a montré une photo où il est habillé en fille, il niaisait comme il dit. Outremont, station Édouard Monpetit ai marché jusqu’à côte Sainte Catherine là où y’a les collèges de jeunes filles bien. Dans un abribus une bonne femme d’un âge certain se trémousse comme une toxico, j’ai pas dit un mot. P.L. se dope il écoute de la musique il a une sensibilité au son, un rapport avec l’absolu qui comme la musique est insaisissable. Il m’a apporté une enveloppe au nom de Bernard. Une soumission je prends ça comme un contrat mis sur ma tête c’est une menace j’éclate en larmes c’est pénible je sens une espèce de flux qui me monte au cerveau. J’essaye de contenir tout ça comme si tout à coup des nuages se formaient dans ma tête. Criss ! à kèk part je fais rire de moé, les gars me quêtent de l’argent. Kâlisse ! Je dois ma chemise. Dans mes fantasmes y’a que des femmes et des femmes après une relation sexuelle je deviens quasiment psychotique et muet. J’entends des craquements à l’intérieur de ma tête. Elles me tuent. Ma petite criss de plume bleue ! C’est pas un Mont Blanc, une Bic d’équarrissage qui laisse le rugueux en place comme sur un beam de maison en pièces. Y’a pas d’étoupe dans mes textes, l’air passe et repasse ça chauffe mal ! Ai parlé de Dada d’Henri Michaux, j’y pige rien c’est trop compliqué, tout ce que je trouve à dire est qu’il posait un regard ironique sur l’art, critique aussi mais dada je m’en fous j’aime ce qui est vrai pas des choses qui se cachent derrière un masque. J’aime l’authentique et le sincère c’est pour ça que j’ai envie de vomir mes tripes quand j’écris. P.L. est intelligent mais il mise trop là dessus, il parle de maîtrise universitaire nos opinions divergent. Je le définis comme un schizo-affectif manipulateur. Il fait trop son finfinaud ça va lui retomber sur le nez. M. tente de le sauver, lui, marche aux menaces de suicide. Il tente de m’amadouer avec mon intelligence, c’est pas tout dans la vie. Je le vois là assis à la table de la salle à manger, ses contenants de comprimés à portée de main fumant cigarette sur cigarette les yeux dans le vague pour pas dire dans le vide y’a des odeurs de « rubber » chauffé de poissons pourris. M. fait penser à une sorcière une casquette de baseball couvre ses longs cheveux gris tressés, elle porte des verres pare soleil, une jupe noire superposée à des jeans parfois elle a une cape et traîne trois ou quatre sacs. Il arrive de Delhi un long vol, des papiers ce qu’il a sur le dos pour bagage et un parapluie, une adresse aussi, le numéro et la rue d’un vague cousin parti il y a vingt ans. Baragouine l’anglais avec un accent hindi. Il en peut plus a pas dormi, les yeux rougis il somnole dans l’autobus qui l’emmène au centre ville sa tête penche aussitôt le bus parti. Montréal lui donne l’impression d’un grand village. Il est quand même perdu, s’arrête dans un bar au centre de « nowhere ». Des filles à poil avec des cabarets d’autres avec des tabourets se trémoussent. Il montre du doigt le néon Budweiser boit sa bière fait danser une fille. Il est en Amérique le lieu où tout est possible, il oublie son cousin oublie la nuit tout brille comme jamais. Il sort marche et marche dans la nuit froide de Montréal. C’est bête, bête comme un veau, je traînasse, je dandine I’m still fighting against ghost. Je me tâtonne le cou. C’est presque un corps à corps moi contre moi. Je racontais, les hara kiri. Comment à l’arme blanche sans un cri les samouraïs sauvaient l’honneur. Je pense à mon gars de Delhi qui erre encore dans les autobus. Il ramasse toute sorte de choses dans un sac en polythène. Je pars à l’épouvante. Une ombre furtive passe à bicyclette, un autobus, l’Indien n’y est plus. Je veille, je veille à mon corps éveillé. Y’a une tête de pot rastafarienne du nom de Tremblay qui sait pas qui est Haïlé Sélassié. Je me sens bizarre, capoté. M. et P.L. vont boire dans un fond de ruelle, ils se pognassent, saouls, ils marchent sur Saint Laurent. J’ai de la difficulté à trier le grain de l’ivraie. Je cherche un rythme. M. et P.L. parlent d’un grand chaos pour l’an deux mille ils disent ça avec le sourire. L’Indien est seul dans la balançoire il a tordu les chaînes pour s’étourdir, il berce son grand corps en lâchant un rire de souffrance. Il ne sait pas, il ne sait plus, la tête lui tourne dans un petit parc du Centre Sud. Il pense à se faire marcher dessus par une enfant de huit ans, elle est trop loin, lui étendu sur le ventre comme pour un massage. Le Mahavishnu Orchestra joue. P.L. me raconte un fantasme il entre au resto il dit qu’il va prendre la serveuse, elle s’étend sur une table, écarte les jambes et il lui « mange la plotte ». Check it out ! M. et P.L. après le show cherchent un endroit où finir, ça ne finit jamais. Ils s’amusent avec un avion miniature tentent de le faire voler l’avion pique toujours du nez, que de voyages ils font jusqu’au bassin du Taj Mahal. Personne entend, c’est que syllabes disjointes, coupées, interrompues. Le désert achève de parler. Le sable est muet. La terre gelée attend. Je sais plus si j’ai le cur à gauche ou à droite physiquement et littéralement. Su’l plateau pendant que les chats déchirent les sacs de vidange je suis toujours dans le même ostie de café ça fait mongol en ciboère poète su’l plateau. T’as tu deux minutes bébé que je jase avec toé, tu t’es trouvé un beau grand bum. P.L. voit une image de Christ enflammé les bras levés au ciel, lui pense brûler plutôt que le Christ. J’écoute un raga. P.L. a défait le visage du gérant de la brasserie. Un cadavre enflé et boursouflé dérive sur le fleuve, on a pas pris la peine de le faire brûler comme aux Indes. Moderne on vous garrotte vous assomme et vous jette dedans ça fait le petit en cas de quatre heures pour les mouettes. From deepshit nowhere to deepshit nowhere. P.L. essaye d’adapter la réalité à lui plutôt que de s’adapter à la réalité. Il attend M. Ils doivent partir. Un homme lui dit quoi faire. M. est dans une autre partie du bar elle arrive dans une atmosphère fin cinquante début soixante. Sous le regard de la folie les enfants de chienne vous vissent vous virent et vous voient en vous voyant vous virez de bord chaviré. P.L. entre dans un hall pour prendre des journaux un policier discute avec des gens. P.L. prend le temps de choisir. Il se retourne et se met à hurler qu’on a volé sa bicyclette sous les yeux du policier. Il croise trois gars près d’un mur de brique leur fait peur et récupère son vélo. Je pense à l’Indien l’idée de décapiter et plumer un poulet me répugne. L’Indien entend de drôle de messages sur son baladeur, tout est brouillé, il perçoit des mots, hot stuff, easy money, spend easy, underground job, dirty money. Je rêve d’un état d’inculture d’aculture faut pas s’attendre à ce que le bum finisse ailleurs que dans le bas de la ville. So fucking marteau ! L’Indien sur la glace s’étonne de l’abondance de déchet. Au dépotoir Miron il est éberlué. Le tas d’ordure qui pourrit là depuis des années. Je suis avec une grosse femme blonde dans une Lincoln Continental aménagée comme une chambre. Je lui dis que P.L. c’est n’importe quoi, des mots sans mots. Elle me répond que j’ai compris et part. Je la retrouve devant un comptoir, derrière y’a un noir. P.L. a des « fitting » et des « spring » dans les cheveux anarchiste en voiture, tout un numéro. Je cherche l’Indien, coin Gilford Saint Denis, il suit à gauche perd la montagne de vue se demande où est cette étrange croix, il longe Mont Royal se retrouve au parc Jeanne Mance un monsieur lance à un enfant un ballon en forme de fusée, il marche jusqu’au monument à Sir George Étienne Cartier s’enfonce dans les sous bois de la montagne trouve un sentier le gravier crisse. Je me rase le crâne au son d’une Gnossienne de Satie. Seulement, finir là, sous un petit talus de terre fraîchement retournée, après, ça gèlera, au printemps des brins d’herbe pousseront du trèfle peut être et quelques pissenlits. J’ai vu la gueule du salaud, avec toujours la même ostie de barbe et son air de moine au volant d’une japonaise noire l’idiot est venu me regarder pisser dans l’urinoir. P.L. est égaré sur le campus universitaire, il se retrouve près d’une cuisinière y’a plein d’aliments on les lui refuse. Il retrouve M. qui a reçu sa bourse elle lui demande de faire le résumé d’un livre sans titre avec un cheval sur la jaquette, tout à coup les gens sortent en courant, P.L. sort aussi, un gardien tient la porte y’a une émeute à l’intérieur on tire des coups de feu. J’ai tout fait pour fuir loué des chambres de motel et d’hôtel parcouru le même trajet en autobus pendant des jours regardé la télé au milieu de la nuit acheté une voiture et mangé de l’asphalte. M. traîne son chiot doberman dans un panier à roulette elle inspecte les bacs à recyclage. Je suis tellement affreux que les lampadaires s’éteignent à mon passage. Je me suis perdu et ne me retrouverai jamais. P.L. est en voyage il déambule encore dans un grand hall qui mène à une banque. M. fait une demande de crédit. Sais tu ce que c’est un sans génie, c’est un idiot, quelqu’un qui a pas de jugeote. P.L. pense que les animateurs de télé lisent dans ses pensées, il dit à M. qu’il a fait des tests, une fois il a demandé à l’écran si il y avait une guerre atomique en ex U.R.S.S. l’animatrice lui a fait signe que oui. Il écoute les chants de Noël de Bing Crosby, c’est tôt, très tôt pour entrer dans cette nostalgie malsaine, il rêve d’être boxeur d’un Knock out. « L’inconscience est mon ennemie » dehors un vieux matou chasse le pigeon la queue ébouriffée. Suis allé marcher dans les beaux quartiers, Laurier à partir du centre Lucie Bruneau, entre Fullum et Papineau rien d’extraordinaire tout de suite après une foule de boutiques de cafés. Suis allé pisser chez Claudette, plein de monde certains ont eu une dure veillée. Ils portent des chapeaux à la Mistral savent pas qu’à l’intérieur on enlève son couvre chef peut être que le cheveu se fait rare. Une femme m’a jeté un regard furtif. J’ai imaginé plein de choses semblait y avoir de la douceur de la tendresse dans ce regard, me suis encore rendu à côte Sainte Catherine. J’ai pas d’affaire là je suis spécialisé dans la misère des bas fonds. Métro Papineau, un psychotique prend l’autobus pendant que le chauffeur est aux toilettes. La misère a fait des traces dans le visage des gens. Personne ne peut me faire confiance je me suis rangé du côté de Dieu. Soudain y’a plus de musique, que des mots, là, sans rythme, sans tension rythmique, le rite, le rituel. L’Indien pense au bord du Gange à ces veuves qui se jettent sur le brasier. Il voit les flammes des cheminées de l’est. Mon cas s’aggrave, je coule de plus en plus, ça fuit, là, entre mes deux jambes, un petit liquide verdâtre comme si tout ce que j’ai dans la tête finit là dans mon slip. L’Indien en voyant l’oratoire Saint Joseph pense au Taj Mahal c’est beaucoup moins beau y’a pas de bassin. J’ai perdu l’Indien, il est peut être dans l’échoppe d’un compatriote. L’Indien il se fait pas de cinéma, il sait que ça joue dur ici aussi mais d’une autre façon qu’aux Indes, on est pas enfermé dans une caste le destin vous garde à votre place. N’est pas Maharadjah qui veut, Krishna le sait. Parfois en marchant je crois croiser l’Indien, y’a toujours un ou deux impatients qui veulent le trottoir. It’s tough out there ! P.L. me parle d’une fille qu’il a connue, morte du cancer, il l’avait mise enceinte. Ils se défonçaient jusqu’à la psychose. Elle s’était fait avorter. Lui se disait que ça valait pas la peine de rajouter un taré sur cette planète souffrante. L’Indien avait brûlé sa fille unique une bouche de trop dans l’océan affamé de ce pays. L’Indien veut reconstruire sa vie, manger à sa faim. Il est encore perdu. On lui demande si il connaît Calcutta, il comprend pas. Je suis maboule, le nud c’est ici qu’il s’écrit, y’est rien arrivé juste des hystéries, des peurs, des scrupules. Il couche nu sur le vinyle froid du matelas parfois il ramasse de vieux appareils électroniques, il essaie d’en découvrir les secrets, l’ennemi se cache dans les puces les transistors. Il les laisse morts comme des talismans. Il est protégé de cette inquisition fantomatique. Une télé a explosé au début d’un film érotique. Jusqu’à quand les dévotions sont permises. L’Indien ça peut être mon karma ma réincarnation perdue puisque je suis mort, oui je suis mort dans ces mots et ces malaises incongrus. Je suis devenu une âme errante qui s’est accrochée à un corps pour voir le même monde avec d’autres yeux. J’ai parlé à une sur de la Charité, ça me rappelle des choses des gens des lieux à des lieues. Je pense à la cithare de Ravi Shankar au violon de son frère, au tabla, à Krishna, à Bouddha. Un mort qui n’a que des clichés des Indes. Comme l’Indien n’a que des clichés de l’opulente Amérique. Le froid ça pique. J’invente un titre pour un raga, conscience éternelle. Je connais rien des Indes que des mots comme brahmane. Je suis mort mais dans cette peau je voudrais écrire en sanskrit. Lire les védas dans la langue d’origine. Les entendre. Qui c’est le Maharashi Mahesh Yogi, il me semble que je l’ai connu comme cet autre Sri Chinmoy qui sévit encore en Occident. Pourtant mon corps a quitté tout ça. La déesse Shiva m’a étreint jusqu’à la mort. J’ai des images de femmes portant le sari. Je suis réincarné en cas d’Inde. On travaille pas le dimanche ! Ni le jour du Shabat ! L’Indien n’en a rien à faire, plongeur, il prend la vaisselle, la rince, la place dans le lave vaisselle en ajoutant du savon. Voilà ! Elle se lave pendant qu’il essuie les verres à vin. Le midi c’est comme une chaîne sans fin aussitôt sortie elle sert à nouveau et revient pleine de restant. Enfin ! C’est un boulot. Un hindou, qu’est ce qu’il fait là ! C’est moi je sais pas combien de vies après dans une rue étroite et odoriférante de Delhi. Je suis quand même pas pour écrire tous les Bombay tous les saalam. Je suis mort j’y suis jamais allé. J’habite la ville de la dépression. P.L. me parle de la première fois où il est passé en cour, sept ans, cour juvénile, un vol dans une église. Pas lui il dit que c’est pas lui. Là c’est l’opéra ça gaze ! C’est gazant ! P.L. échevelé debout sur le stage gueule les seuls mots anglais qu’il connaît. Je sais pas quelle magnitude ont les ondes qui atteignent son cerveau mais il sent le besoin de porter par-dessus sa tuque un lourd casque de plomb. L’hindou travaille dans la boutique d’un compatriote. Elle est remplie de jouets qui ne plaisent pas aux parents occidentaux. Y’a des appareils électroniques de fin de série peut être des contre façons. Les femmes discrètes jasent derrière le comptoir. P.L. veut des cigarettes s’en va rejoindre l’hindou et taper le bitume toute la journée. Plus de téléphone, plus d’appart, il déguerpit à l’écouter les autres ont toujours tort. Aux Indes il y a cent vingt millions de musulmans. Les hindous intégristes détestent les catholiques, parce que, disent ils, ils forcent les gens à se convertir. Ici, rien de ça, l’hindou en moi ma réincarnation s’adapte à l’occident. J’ai jamais connu autre chose que l’automne, l’hiver, le froid, la neige. J’y connais rien aux Indes à part peut être l’odeur de cumin. D’indien il passe à hindou, c’est moi, c’est pas moi. Combien sont descendus du train de freight ce matin, ont passé la frontière illégalement en provenance d’un ghetto de la grosse pomme. Là où ils croyaient tout permis, Montréal, Canada. J’y connais plus personne, j’y connais plus rien, c’est pas le nirvana. Bon bein ! Je reviens ! L’hindou, l’Indien je le laisse là je réintègre ma peau. P.L. est vraiment dans l’« American dream » loyer pas payé, téléphone aussi sans compter ses autres dettes. Il ne dort plus mais tout ça c’est pas de sa faute « il fait le fou ». L’hindou a pas besoin de Noël. Ça m’emmerde, je sais plus qui je suis, l’Indien ou moi. C’était les surs de la Charité ou de la Miséricorde ? J’ai jamais su un véda. J’ai pas l’âme au rationnement aux prières à Vishnu. M., dépressive s’est laissée envahir par ses colocs, une gang de drilles entre deux vins, l’appart est devenu une auberge espagnole. M. sait plus qui habite là un inconnu s’est installé dans sa chambre, paralysée, elle n’ose dire un mot s’affale sur un fauteuil et pleure. P.L. arrive au hasard d’une dérive il « spotte » vite le hangar l’aménage pour M. Je suis pas deux, je suis trois quatre. Hier l’hindou était dans le métro avec un pardessus ayant l’inscription Canada. Il disait le Canada c’est mon égalité de droit devant la loi. M. en veut à la terre entière elle reste muette près de la psychose. Immobile elle regarde les voitures, ses douleurs de petite fille enfouies très loin dans sa mémoire. P.L. change la musique d’un moment à l’autre, il cherche de l’amour en faisant ça une approbation pour son bon goût. L’hindou revient c’est moi qui décide de suivre un policier, c’est pas le bien et le mal, ça ne se pose pas comme ça y’a autant de bon dans l’hindou que dans moi je m’y perds. C’est comme si j’étais anesthésié et que je me retrouvais d’une seconde à l’autre dans mon « vrai moi » nord américain francophone. L’hindou fantoche est parti. Dans Emmanuelle le type enculait un Indien pendant que celui ci pénétrait la belle. M. est devenue junkie, j’essaie d’imaginer sa vie entre les « hit » pis le trottoir, marcher et guetter un client pour vingt dollars la pipe. M. se mire dans la vitrine elle est filiforme le visage comme une lame. Aujourd’hui une enfant de quinze ans est disparue, encore un salaud qui a décidé d’enlever l’innocence tranquille d’une jeune fille. M. à quinze ans a vécu des moments très difficiles elle est restée vivante mais révoltée, au fond parfois elle a raison ça vaut pas la peine de se casser le train pour une vie décente. M. a jamais pardonné ne s’est jamais pardonné. Les types dégueu elle prend leur fric et merde aux vaches. Tiens ! L’hindou qui revient, il veut prier méditer. M. a eu sa part d’abus et de fugue s’est envoyée dans la vie avec un grand garçon pas très respectable. Ça prenait du fric y’avait que danseuse pour un « minimum d’effort ». La peur s’est installée, défaite elle se tordait dans le métro, les doigts sur les gencives. M. se rend au boulevard des épaves en espérant apercevoir P.L. la désespérance sous le bras et la seule envie de ne pas voir que tout s’écroule. « C’est toutte des ostie de sales ». Survivants de la folie du monde ils ne savent plus ne sentent plus. M. s’acoquine à n’importe qui du moment qu’elle n’est pas seule. L’hindou s’est trouvé un meublé. Il dort pense à sa famille veut envoyer de l’argent. M. s’est réveillée sur un banc d’église, elle regarde le décor, autel, crucifix, chemin de croix, ça lui rappelle tout ce qu’elle veut oublier. Son corps marqué partout son teint jaune sa maigreur. Elle maudit tout. L’hindou dit faut s’endurer, s’endurer soi après c’est plus facile, mais c’est pas vrai ! Cette saloperie d’hindou où je suis allé chercher ça ! Je suis pas brahmane. M. croise un chien errant, la queue basse, il est fou, même les chiens ont le dégoût. Qu’est ce qu’il en dit de ça l’hindou. Elle ira au nirvana ah oui ! En chantant my sweet Lord ! Elle retourne à l’église défonce un tronc prend l’argent se paye un taxi pour la piquerie and shoot again ! Overdose on la jette sur le trottoir, les passants l’évitent, on la connaît ça fait des années. Non c’est pas la Charlotte prie Notre Dame. Elle crève. Voilà je viens de la faire mourir c’était son karma, elle se réincarnera dans un livre le kama sutra les milles et une règles de l’amour, l’araignée, le pouce dans le vagin et l’index dans l’anus. P.L. pense à M. sait pas qu’elle est morte. L’hindou dort il est bien enfermé au fond de mon cerveau. P.L. veut plus fréquenter les bas fonds il appareille une autre galère. L’hindou qu’est ce qu’il fait faut croire qu’il a atteint le sommet de la sagesse, l’ultime silence éthéré. P.L. entre deux gorgées de Southern Comfort rêve de voyage, les Indes où avec son salaire il mènerait la vie de pacha. Ça y est l’hindou revient dans ma tête. Les kids se baignent dans le Gange… Gandhi le grand Mahatma Gandhi qui faisait les choses sans violence. Des clichés encore des clichés c’est cet hindou il me lâche pas m’envoie des pensées de familles qui font du tri sur une montagne d’ordures. Je m’invente un hindou pour tarabuster les images vues à la télé. Connais que P.L. et M. qui a vécu cent mille mort avant de trouver la paix… P.L. fait de l’ébénisterie dans un asile d’aliénés. Il hait le bois, son grain, sa couleur, son odeur mais il fait quand même parce que ? Il se répète des prières. P.L. ne pense plus a pas fait un long séjour il traîne dans le Centre Sud, il cherche M. les pimps les pushers sont pas loin. Christ ! Estie ! Ciboire ! Tabarnak ! Qu’esse tu viens faire icitte ! Écure moé pas ! Crisse moé la paix ! M., M., M., tu t’es tué. L’hindou est assis sur un banc près de moi il regarde les écureuils. M. l’hindou et P.L. je les laisse tomber parce qu’à un endroit dans le pays étroit y’a quelque chose de ressemblant. Roméo et Juliette version destroy post moderne tout le monde y a pensé. Qui c’est la déesse sur son char de feu. J’essaie de transformer ma manière de comprendre. M. a pas pu transcender sa souffrance. Je remarque comment on fait attention à son petit popotin le dépose délicatement sur une banquette d’autobus c’est précieux un cul. Là, y’a plus rien, ils sont tous partis, je ne sais où. « Du vent naît le feu : car il naît de la respiration, étant allumé par la force, que le feu naisse ; que mon ennemi, ne naisse pas ; qu’il s’enfuie, loin d’ici ! ». Lexique
bum : voyou, type qui traîne (sens premier : clochard) |
du même auteur chez Hache: Dérive des corps dans la grande ville, contrepoint du texte, rythme, drôlerie, recueillement. |
© Hache et les auteurs sauf mention contraire
|